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Endocrinologie

Publié le 09 nov 2008Lecture 9 min

L’hyperpilosité féminine…un problème horripilant !

M.-L. BARBET, Paris
L’hyperpilosité, autrement dit l’excès de poils, est bien difficile à définir puisque la limite de la normale est elle-même très mal précisée. Les choses se compliquent encore quand on veut distinguer hypertrichose et hirsutisme idiopathique, d’autant que l’idiopathique peut parfois se révéler secondaire. Comment s’y retrouver dans ce problème horripilant et parvenir à proposer aux patientes une solution qui les satisfasse ?
Les poils du corps se distinguent en poils constitutionnels qui ne sont pratiquement pas sous dépendance hormonale, et les poils ambosexuels qui apparaissent (dans les deux sexes) à la puberté sous l’effet de la sécrétion des androgènes au niveau axillaire et pubien et, essentiellement, chez le sujet de sexe masculin au niveau de la barbe, de la moustache, sur les épaules et la poitrine, le sillon interfessier, les faces internes des cuisses, le dos des mains et des pieds.   Quand parler d’hyperpilosité chez la femme ? Chez les petites filles, la pilosité est constitutionnelle, c’est-à-dire essentiellement visible sur les bras et les jambes. À la puberté, sous l’effet de la production d’androgènes par les ovaires (associée aux androgènes surrénaliens) apparaissent les poils pubiens et axillaires avec possible débord sur les cuisses, la ligne sous-ombilicale, la zone sousombilicale, les régions périmamelonnaires, tandis que s’accentue la pilosité constitutionnelle. Il peut y avoir un duvet au-dessus de la lèvre ou dans le sillon intermammaire. Ces variations, qui n’ont le plus souvent rien de pathologique, sont essentiellement liées à l’ethnie (origine méditerranéenne) et à des facteurs génétiques. Cependant, il est bien évident qu’elles peuvent être mal ressenties sur le plan psychologique et être considérées par la femme comme « anormales » par rapport aux « canons » de l’esthétique. À la ménopause, la cessation de la production d’estrogènes peut donner lieu à une hyperandrogénie relative entraînant l’apparition de poils dans des zones « masculines » : régions de la barbe ou de la moustache, par exemple. La normale en matière de poils est donc bien difficile à définir puisqu’elle est soumise à des variations qui sont d’ordre physiologique et ethnique ou familiale. La notion d’hyperpilosité, autrement dit d’excès de poils, reste donc en partie subjective reposant en pratique sur l’acceptation ou non par la patiente d’un statut pilaire qui n’est pas en accord avec les règles esthétiques de l’époque et de la société dans laquelle elle évolue. Il faut bien reconnaître que l’impératif actuel en cette matière est d’avoir le visage glabre, les aisselles, le corps et les membres lisses… La notion d’hyperpilosité repose en pratique sur l’acceptation ou non par la patiente de son statut pilaire.   De l’hyperpilosité à l’hirsutisme, il n’y a presque qu’un pas… Et pourtant, nous sommes là à présent dans un cadre réellement pathologique. En termes de définition, l’hirsutisme est marqué par l’existence de nombreux poils dans des zones habituellement uniquement pileuses chez l’homme, c’està- dire la barbe, la moustache, la poitrine, le dos, les faces internes des cuisses et la zone sus-pubienne. Ces poils peuvent être plus ou moins épais devenant parfois comparables aux poils masculins (on parle de virilisme pilaire). La distinction avec l’hyperpilosité sévère est encore là affaire de nuance. Mais dans certains cas, le doute est moins permis lorsque l’hirsutisme s’accompagne d’autres manifestations cliniques telles qu’acné, alopécie, troubles menstruels ou encore signes de masculinisation (changement de la voix, modification de morphologie…). Le doute entre hyperpilosité sévère et hirsutisme diminue en cas d’autres signes d’hyperandrogénie associés. Des causes hormonales sont à incriminer Qui dit hirsutisme dit de toute façon exposition excessive des follicules pilosébacés aux androgènes. Celle-ci peut être liée à : • une hypersensibilité des récepteurs folliculaires aux androgènes, un nombre accru de ces récepteurs ou encore une hyperactivité de la 5-alpha-réductase (qui transforme la testostérone en DHT) : ce sont les mécanismes les plus généralement incriminés dans l’hirsutisme idiopathique apparaissant à la puberté, le plus souvent modéré, isolé (sans troubles menstruels), peu évolutif dans un contexte souvent familial et/ou ethnique. • une production accrue d’androgènes d’origine endocrinienne (blocs surrénaliens, Cushing), ovarienne (syndrome des ovaires polykystiques) ou tumorale : l’hirsutisme s’accompagne alors le plus souvent d’autres manifestations d’hyperandrogénie. • la prise de certains médicaments : stéroïdes anabolisants, contraceptifs estroprogestatifs à activité androgénique marquée, etc.   Quand faut-il faire un bilan ? Il n’est pas a priori justifié de pratiquer des examens complémentaires devant une hyperpilosité simple. Mais on a vu qu’il n’est pas toujours aisé de faire la distinction entre cette situation et un hirsutisme léger. En cas de doute, le bilan comportera au minimum un dosage de la testostérone, de la delta-4-androstènedione et de la S-DHA sériques. Les taux sont normaux en cas d’hypertrichose simple. Ils sont également normaux ou très légèrement augmentés en cas d’hirsutisme idiopathique. Des taux plus élevés et/ou des signes cliniques d’appel imposent un bilan biologique plus poussé (recherche d’un bloc surrénalien, par exemple) et la réalisation d’une échographie (recherche d’un syndrome des ovaires polykystiques, de tumeurs ovariennes virilisantes, de tumeurs surrénaliennes). Le bilan hormonal minimal est normal ou très légèrement augmenté en cas d’hirsutisme idiopathique.   La prise en charge : médicale et esthétique En dehors des situations bien particulières d’hirsutisme secondaires, qui réclament des traitements spécifiques, l’approche thérapeutique dans l’hirsutisme primaire et, éventuellement dans l’hypertrichose, dispose de plusieurs armes :   Les anti-androgènes en première ligne face à un hirsutisme C’est l’acétate de cyprotérone qui est ici habituellement utilisé.   En cas d’hyperpilosité, on peut proposer la pilule Diane 35® (ou un générique) qui contient 2 mg d’acétate de cyprotérone et 35 μg d’éthinyl estradiol de préférence à un autre contraceptif.  Lorsqu’il s’agit d’hirsutisme, l’acétate de cyprotérone est prescrit classiquement à 100 mg/j (1 comprimé d’Androcur® à 100 mg ou 2 à 50 mg) du 1er au 10e jour du cycle associé à 50 μg d’éthinyl estradiol du 1er au 21e jour du cycle. Un autre schéma d’administration (plus simple et semblet- il moins à risque d’hépatotoxicité) est également possible : association de 50 mg d’acétate de cyprotérone avec 35 μg d’éthinylestradiol (ou un estrogène naturel per os ou en percutané) pendant les 21 premiers jours du cycle avec un effet contraceptif à partir du 3e cycle. Les effets secondairessont essentiellement les troubles menstruels, la prise de poids et l’aggravation d’une insuffisance veineuse.  Les autres anti-androgènes utilisables dans cette indication comprennent : la spironolactone (Aldactone®), prescrite à la posologie de 100 mg/j, le flutamide, antiandrogène non stéroïdien, sans autre activité hormonale (250 mg/j) qui présente cependant un risque d’hépatotoxicité, et le finastéride (5 mg) qui réalise un blocage de la 5-alpha-réductase avec un bon profil de tolérance. Une contraception orale faiblement dosée doit être associée. L’efficacité du traitement hormonal ne se manifeste qu’à partir du 6e mois d’administration en limitant la pousse des poils.   La destruction du poil : des méthodes artisanales aux lasers les plus sophistiqués. Qu’il y ait ou non recours à des traitements hormonaux (dont l’efficacité ne se manifeste au demeurant qu’à partir du 6e mois d’administration en limitant la pousse des poils), l’épineux problème de l’élimination des poils présents reste posé. Là encore, diverses options sont possibles. Citons les plus artisanales et les plus provisoires (mais aussi les moins onéreuses) : la décoloration à l’eau oxygénée, l’épilation à la cire, l’épilation chimique (crèmes dépilatoires) et le rasage. Deux techniques peuvent permettre une élimination des poils sur une longue durée : l’épilation électrique et l’épilation au laser.  L’épilation électrique, débutée 3 mois après l’initiation du traitement hormonal, est une entreprise de longue haleine, car les surfaces traitées à chaque séance sont peu étendues (50 à 100 poils par séance au maximum) et une repousse de 30 % des poils (qui deviennent cependant plus fins) se produit entre chaque séance. Elle est douloureuse et peut parfois laisser des cicatrices.  L’épilation laser, quel que soit le type d’appareil utilisé, nécessite également plusieurs séances (entre 3 à 6 séances en fonction de la superficie de la zone à traiter et de l’importance de la pilosité). La méthode est également désagréable, voire douloureuse, requérant parfois l’application préalable d’un topique anesthésique. Les résultats sont réputés meilleurs sur les poils bruns ou noirs et sur les peaux claires, non hâlées (l’éviction solaire est préférable avant et après l’épilation). Le risque d’effets secondaires (troubles pigmentaires, folliculites) est plus élevé sur les peaux foncées. L’éviction solaire est préférable avant et après l’épilation.   Une autre carte : l’éflornithine Molécule initialement réservée au traitement d’une parasitose africaine, l’éflornithine a la capacité d’inhiber la synthèse des polyamines nécessaires à la croissance du poil. Commercialisée en France sous le nom de Vaniqa®, la crème à l’éflornithine, à raison d’une application matin et soir, retarde la pousse du poil. Elle est réservée aux hyperpilosités faciales et elle permet d’espacer les séances d’élimination des poils, quelle que soit la méthode choisie. Elle peut être employée sur tous les types de peaux (y compris les phototypes foncés). On ne peut l’utiliser en cas de grossesse ou d’allaitement, et il est recommandé de ne pas l’appliquer immédiatement après un rasage. Quelques effets secondaires minimes sont possibles : acné, folliculite, poils incarnés.   Consulter, c’est déjà souffrir L’excès de poils, qu’il soit subjectif ou réel, peut être combattu de bien des façons, même si cela réclame souvent un long investissement de temps (et parfois d’argent). Il faut de toute façon garder à l’esprit que même si le handicap ne paraît pas majeur, les poils considérés comme superflus sont toujours très difficilement acceptés quand ils vont jusqu’à motiver une consultation. À ce titre, les patientes méritent d’en être soulagées.

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