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Urologie

Publié le 31 mai 2025Lecture 5 min

Bandelette urinaire synthétique : faut-il interdire la TOT ?

Hélène JOUBERT, d’après la session « Faut‐il interdire la TOT ? »

Le scandale des « implants files »* il y a près de cinq ans a conduit à une réflexion sur le choix des bandelettes synthétiques urinaires chez la femme dans l’incontinence d’effort. Les bandelettes synthétiques par voie rétropubienne sont devenues la solution à privilégier dans la grande majorité des situations. Cependant, faut-il interdire totalement la pose des bandelettes transobturatrices (TOT) ? La question reste complexe et a été soulevée lors du congrès de l’AFU 2024.

Faut‐il, donc, interdire totalement la pose des bandelettes transobturatrices (TOT) ? La question a fait débat au congrès de l’AFU en novembre dernier, où la Pr Marie‐Aimée Perrouin‐Verbe (CHU de Nantes) a, d’un côté, mis en avant les risques documentés des bandelettes TOT et la Pr Véronique Phé (Paris) a, de l’autre, souligné qu’une interdiction priverait certaines femmes, bien que peu nombreuses, d’une solution efficace pour elles. Ce débat ne minimise pas les effets secondaires possibles, rares néanmoins, subis par des patientes ayant été implantées d’une TOT. Sur ce point, en 2025, la communauté urologique est unanime : la prise en charge de l’incontinence urinaire d’effort due à une hypermobilité urétrale, après échec des traitements conservateurs, repose aujourd’hui sur la pose de bandelettes synthétiques par voie rétropubienne (TVT). En revanche, la possibilité de poser des bandelettes TOT, vu leur rapport bénéfice‐risque, soulève des discussions. En sortant de la session, le Pr Xavier Gamé, chirurgien‐urologue au CHU de Rangueil (Toulouse) et président du Conseil national professionnel d’urologie, précise : « Je pense qu’il est nécessaire de conserver la TOT mais d’en restreindre l’usage, comme pour les patientes qui ne peuvent pas bénéficier d’une TVT. » Cela inclut, par exemple, les femmes multi‐opérées au niveau abdominal ou celles présentant des antécédents de traumatismes pelviens, rendant l’approche rétropubienne difficile en raison d’adhérences importantes.   Préférer la voie rétropubienne lorsqu’elle est possible   « Il ne faut pas jeter le discrédit sur les bandelettes », avertit Xavier Gamé. L’urologue rappelle que celles‐ci affichent un taux d’efficacité de 90 %, avec seulement 3 % de complications nécessitant une reprise chirurgicale et 0,3 % de douleurs sévères. Bien que rares, elles peuvent néanmoins avoir des conséquences graves pour les patientes concernées. « Le rapport bénéfice‐risque des bandelettes demeure cependant favorable, surtout en comparaison avec d’autres traitements médicaux. Il est rare qu’un médicament atteigne de tels résultats avec un taux aussi faible de complications. » Toutefois, pour une patiente souffrant de douleurs sévères et dont la qualité de vie est gravement altérée après la pose de TOT – plus de douleurs inguinales et de la racine de la cuisse –, ces complications, parfois sur la durée, sont une véritable épreuve. Ces syndromes myofasciaux sont imprévisibles et souvent complexes à traiter, le retrait étant également plus difficile que pour les TVT. Ces situations exigent une prise en charge attentive, avec une reconnaissance rapide des symptômes et un traitement adapté. Alors que l’équivalence d’efficacité entre TVT et TOT n’est pas encore tranchée, selon une revue Cochrane de 2017, le risque de douleur inguinale est plus élevé dans le groupe TOT par rapport au TVT (6,4 % vs 1,3 % ; RR : 4,12 ; IC 95 % : 2,71‐6,27 ; 18 essais, 3 221 femmes, preuves de qualité modérée). Ces complications sont également plus difficiles à gérer. « Que l’on procède à une ablation complète ou partielle, l’amélioration ne dépasse généralement pas 60 % à 70 % », souligne Marie‐Aimée Perrouin‐Verbe. De plus, jusqu’à 20 % des patientes peuvent voir leur état se détériorer après l’intervention. Chez nos voisins, la situation est comparable. En Grande‐Bretagne, le standard actuel repose sur la colpo-suspension du col vésical (opération historique de Burch) ainsi que sur la pose de bandelettes TVT ou autologues. La bandelette TOT n’est envisagée, quant à elle, qu’en cas d’impossibilité d’emprunter la voie rétropubienne ou dans le cadre de recherches cliniques. Quoi qu’il en soit, la pression médiatique et judiciaire reste forte. Avant la pandémie de Covid‐19, environ 35 000 bandelettes étaient posées chaque année, contre environ 17 000 aujourd’hui. Cela s’explique également par la limitation de l’accès aux blocs opératoires à la suite de la pandémie. Pour ce qui est des industriels, la situation reste incertaine. Dans son avis du 17 avril 2025, la HAS s’est prononcée favorablement sur le projet d’un arrêté visant à encadrer les actes d’implantation des bandelettes sous‐urétrales utilisées dans le traitement chirurgical de l’incontinence urinaire d’effort chez la femme. Cet avis reprend les recommandations de la CNEDiMTS, qui préconisent de réserver ces dispositifs à des centres spécialisés et de renforcer leur encadrement. De nouveaux arrêtés, destinés à encadrer la pose et le retrait de ces dispositifs, devraient être publiés prochainement. À ce jour, certains industriels ont déjà répondu à la procédure, d’autres ont d’ailleurs annoncé leur intention d’arrêter la commercialisation en Europe.   Les bandelettes autologues, une bonne alternative ?   Actuellement, en France, l’utilisation des bandelettes aponévrotiques, bien qu’intéressantes, reste assez marginale, même dans les centres spécialisés. Tout au plus une vingtaine de centres les utilisent. Leur pose nécessite un prélèvement de tissu, généralement un lambeau aponévrotique d’au moins 20 cm de long, au niveau des muscles grands droits de l’abdomen ou, dans certains cas, sur la face interne de la cuisse (fascia lata). Ces interventions laissent des cicatrices importantes et peuvent entraîner des complications telles que le syndrome des loges. « Actuellement, ces bandelettes autologues sont réservées à des cas bien sélectionnés », précise le Pr Gamé. « Bien qu’elles éliminent le risque lié à la présence d’un corps étranger, comme le polypropylène, elles peuvent provoquer des complications spécifiques, parfois supérieures à celles des autres options. » Par ailleurs, des études ont rapporté une perte d’efficacité au fil du temps, phénomène également observé avec la technique TOT, ce qui n’est pas le cas de la TVT.   *Les « implant files » ont révélé des défaillances dans les systèmes de régulation des dispositifs médicaux (prothèses de hanche, stimulateurs cardiaques, implants mammaires, matériel prothétique urinaire…), en particulier en Europe et aux États‐Unis, où les autorités de santé n’avaient pas toujours suivi de manière efficace les problèmes liés à ces implants. Depuis 2020, plus d’une centaine de femmes en France ont porté plainte contre X à la suite de complications survenues après la pose de matériel prothétique dans le cadre du traitement chirurgical de l’incontinence urinaire d’effort et du prolapsus vaginal. D’après la session « Faut‐il interdire la TOT ? », avec le Pr Marie‐Aimée Perrouin‐Verbe (Nantes) et le Pr Véronique Phé (Paris), Congrès français d’urologie, 20 novembre 2024.

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