Publié le 30 avr 2025Lecture 3 min
Faut-il éviter le traitement par la testostérone chez l’homme ayant des comorbidités cardiovasculaires ?
Hélène JOUBERT, Paris

La dysfonction érectile est un indicateur de maladies cardiovasculaires, tout comme le déficit en testostérone. Mais quid du traitement par la testostérone chez les hommes hypogonadiques présentant des facteurs de risque cardiovasculaires ?
Les facteurs de risque des maladies cardiovasculaires (MCV) – hypertension, dyslipidémie, diabète, tabagisme, sédentarité, mauvaise alimentation – sont également associés au déficit en testostérone. « Un taux de testostérone bas favorise les événements cardiovasculaires, la dysfonction vasculaire, les coronaropathies, l’athérome, la dyslipidémie », précise le Dr Carol Burté, spécialiste en médecine sexuelle au centre hospitalier Princesse‐Grace à Monaco. « En conséquence, le déficit en testostérone peut être assimilé au syndrome métabolique, à la coronaropathie prématurée et à l’augmentation du risque de MCV(1) »
Dans les recommandations pratiques françaises pour la prise en charge du déficit en testostérone publiées en 2021(2) et dirigées par le Dr Burté, il est précisé que les cliniciens doivent informer les patients présentant un déficit en testostérone que cela constitue un facteur de risque pour les MCV, que le traitement par la testostérone ne semble pas augmenter le risque de MCV et pourrait même apporter des bénéfices cardiovasculaires. « Cependant, par précaution et en suivant les recommandations internationales, il avait été conseillé de ne pas prescrire de testostérone en cas d’événement cardiovasculaire majeur survenu dans les 3 à 6 mois, souligne‐t‐elle. De plus, la prescription était contre‐indiquée si l’hématocrite dépassait 54 %, bien que la littérature n’ait pas établi de lien direct entre déficit en testostérone et augmentation des événements thromboemboliques. » En revanche, la question des patients ayant déjà des MCV n’est pas abordée dans le texte.
Que dit la littérature ?
Une étude de pharmacovigilance de la FDA (2002‐2004) a observé 3 057 événements cardiovasculaires majeurs sous traitement par testostérone mais aussi des bénéfices (moins d’arythmie, d’AVC et d’insuffisance cardiaque), notamment pour les patients avec des comorbidités (HTA, diabète et déficit en testostérone)(3). Les auteurs concluent que, bien que rares, ces événements graves nécessitent une surveillance accrue des patients à risque. L’étude TRAVERSE(4) est un essai multicentrique randomisé contre placebo (5 246 hommes sur près de 3 ans), évaluant la sécurité de la testostérone transdermique chez des hommes d’âge moyen avec un risque cardiovasculaire. Conclusion : aucune différence sur les événements cardiovasculaires majeurs dans le groupe testostérone par rapport au placebo. Toutefois, des cas de fibrillation auriculaire, d’insuffisance rénale aiguë et d’embolies pulmonaires ont été observés sous testostérone. Une étude auprès de 204 000 vétérans américains suivis pendant 4 ans n’a pas montré d’augmentation du risque d’événements cardiovasculaires majeurs avec le traitement par testostérone chez ces hommes avec multiples comorbidités(5). Une étude comparative rétrospective n’a pas non plus montré de différence dans la fréquence des événements cardiovasculaires majeurs entre les patients traités et non traités par testostérone : celle‐ci ne semble ni protectrice ni avoir d’effet défavorable sur l’infarctus, l’AVC ou la mortalité(6). Une étude observationnelle prospective sur 77 hommes hypogonadiques avec antécédents cardiovasculaires a montré que le traitement à long terme par testostérone (12 ans) améliore la fonction érectile et les facteurs de risque cardiométaboliques de façon durable(7). Une synthèse de la littérature confirme pour sa part que la dysfonction érectile est liée aux MCV et au faible taux de testostérone, mais aucun risque accru de MCV n’a été observé sous testostérone(8). Une étude observationnelle de 8 ans(9), menée de 2007 à 2015, chez des hommes atteints de cancer de la prostate et de MCV, conclut que l’utilisation indépendante et conjointe de statines et de testostérone réduit l’incidence des MCV, tant chez les survivants du cancer que chez les autres patients.
Globalement, « un faible taux de testostérone est associé à un risque accru d’événements cardiovasculaires majeurs », récapitule Carol Burté. « Les données actuelles suggèrent qu’aucune augmentation du risque cardiovasculaire n’est liée à la supplémentation en testostérone, en présence ou non de facteurs de risque cardiovasculaires. Ce traitement doit être personnalisé, avec une surveillance régulière, notamment chez ceux ayant des facteurs de risque cardiovasculaires. »
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