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Endocrinologie

Publié le 02 juil 2020Lecture 7 min

Prise en charge de l’inferilité des déficits gonadotropes hypophysaires secondaires chez la femme

Hélène BRY-GAUILLARD, Endocrinologie et reproduction, CHU Bicêtre ; médecine de la reproduction, CHIC Créteil

L’hypogonadisme hypogonadotrope d’origine hypophysaire doit être exploré afin d’en déterminer l’étiologie pour adapter la prise en charge. L’étiologie du déficit hypophysaire secondaire doit être traitée et suivie ; les déficits hypophysaires associés s’ils existent doivent être bien sûr substitués avant une prise en charge de l’infertilité, qui se fera en général après concertation avec l’équipe d’endocrinologie. Avant toute induction de l’ovulation, il faut vérifier que la perméabilité tubaire et le spermogramme sont compatibles avec une fécondation in vivo.

Les gonadotrophines sont efficaces pour induire l’ovulation dans les déficits hypophysaires, avec ou sans AmP associée, mais de maniement parfois délicat surtout dans l’induction de l’ovulation simple où le but est l’obtention d’un seul follicule L dominant. Dans ce cadre particulier, elle devra être faite par des professionnels aguerris. Le pronostic sur les issues de grossesses reste dans l’ensemble excellent.

L'hypogonadisme hypogonadotrope correspond à un déficit ou un dysfonctionnement des gonadotrophines ; il peut être congénital ou acquis. Il peut être révélé par une aménorrhée ou une spanioménorrhée dans les hypogonadismes partiels. L’exploration hormonale retrouve classiquement des taux de LH et de FSH normaux ou bas associés à un taux d’estradiol diminué. Le niveau d’atteinte peut être hypothalamique comme c’est le cas dans l’aménorrhée hypothalamique fonctionnelle ou dans certaines causes congénitales comme le syndrome de Kallmann, ou hypophysaire. Cet article se focalise sur la prise en charge des causes hypophysaires dans le cadre d’un désir de grossesse. La prise en charge de l’infertilité dépend d’une part de l’étiologie de l’hypogonadisme, d’autre part des facteurs d’hypofertilité éventuellement associés qu’il faudra systématiquement rechercher avant d’induire l’ovulation. Cas particulier de l’adénome à prolactine L’anovulation peut être secondaire à une hyperprolactinémie qui sera recherchée systématiquement du fait de sa fréquence. En effet, l’hyperprolactinémie est responsable de 20 % des anovulations et constitue donc une cause majeure d'aménorrhée avec ou sans galactorrhée. L’hyperprolactinémie entraîne un déficit gonadotrope par inhibition de la sécrétion de GnRH hypothalamique. Cependant, le diagnostic positif d’hyperprolactinémie doit reposer sur un dosage de la prolactine de bonne qualité, reconnaissant le moins possible les macro-agrégats de prolactine responsables de fausse hyperprolactinémie qui ne nécessite pas d’investigation ni de traitement (macro-prolactine à rechercher en particulier si cycle régulier, par précipitation sur PEG). Une IRM hypophysaire doit être systématiquement pratiquée en cas d’hyperprolactinémie avérée à la recherche d’un adénome à prolactine. Le traitement de 1re intention des adénomes à prolactine repose sur l’utilisation des agonistes dopaminergiques qui permet la baisse de la prolactine dès la 2e semaine de traitement et le rétablissement de cycles ovulatoires dans plus de 70 % des cas. Le traitement le plus utilisé, car le mieux toléré et le plus efficace, est la cabergoline(1). Il existe de rares cas de résistance à la cabergoline (moins de 5 % de résistance dose, augmentée jusqu’à 3,5 mg par semaine). C’est le cas parfois lorsque l’adénome est localisé dans le sinus caverneux, ce qui rend difficile la chirurgie hypophysaire, alternative au traitement par agoniste dopaminergique. Dans ce cas, on peut associer une induction de l'ovulation par gonadotrophines. On peut être amené à proposer également une stimulation dans les cas exceptionnels de contre-indication ou d’intolérance aux agonistes dopaminergiques. Une fois la grossesse obtenue, les micro-adénomes ne nécessitent pas de surveillance particulière pendant la grossesse et les agonistes dopaminergiques doivent être arrêtés car inutiles. Les macro-adénomes sont, eux, susceptibles d’augmenter de volume, ce qui peut entraîner des syndromes compressifs, selon leurs localisations. Ils nécessitent donc une prise en charge adaptée avant et pendant la grossesse, en concertation avec les endocrinologues. Le pronostic des grossesses est excellent. Induction de l’ovulation dans les autres déficits gonadotropes avec prolactine normale Le déficit gonadotrope peut être provoqué par des pathologies hypothalamiques ou hypophysaires (tableau 1). Les plus fréquentes sont acquises avant ou après la puberté. Dans ce contexte, la crainte est l’existence d’une cause tumorale ou infiltrative nécessitant une prise en charge spécifique qui souvent doit précéder le traitement de l’infertilité. Les causes congénitales hypophysaires sont plus rares mais posent parfois un problème de conseil génétique en cas de transmission autosomique dominante. Dans toutes les causes hypophysaires, l’induction de l’ovulation se fait par des gonadotrophines ayant une activité FSH et LH (HMG humaine : Menopur® ou Fertistart® ou une association FSHr + LHr fixe (Pergoveris®). En effet, un traitement par FSH seul induit une croissance folliculaire sans montée d’estradiol, dont la synthèse ovarienne nécessite des substrats androgéniques, synthétisés dans les cellules thécales sous la dépendance de la LH. À titre indicatif, on débutera ces traitements (figure) à des doses variant de 75 à 150 UI (selon le poids de la patiente et la profondeur de l’hypogonadisme) pendant 7 jours, puis les doses seront adaptées à la croissance folliculaire évaluée par échographie pelvienne et dosage d’E2, répétés si besoin jusqu’à obtenir une croissance monofolliculaire jusqu’au stade préovulatoire. La réponse ovarienne peut être lente, d’où la recommandation d’attendre 14 jours en début de stimulation avant d’augmenter la dose de gonadotrophine si besoin. La montée de l’estradiol par follicule en croissance est moindre que lors d’une stimulation de l’ovulation pour d’autres causes, ce qui n’empêche pas l’obtention de grossesses évolutives. Lorsque le follicule dominant est mature (> 17 mm), l’ovulation sera déclenchée par une injection d’hCG. Dans le cas particulier du déficit gonadotrope, le soutien de la phase lutéale est indispensable au moyen de 3 injections d’Ovitrelle® à raison de 6 clicks (remplaçant l’injection de 1 500 UI d’HCGu) à trois jours d’intervalle et/ou à l’aide de l’administration de progestérone (Utrogestan® par voie vaginale ou Duphaston® par voie orale). En cas de présence de follicules intermédiaires (11 à 14 mm) associés au follicule dominant, on préfèrera l’adjonction de progestérone à l’administration répétée d’HCG pour éviter le risque de grossesse multiple.  Figure 1. Modalité de la simulation par gonadotrophines dans l’hypogonadisme hypogonadotrope. Le traitement inducteur de l’ovulation dans les hypogonadismes complets n’est pas toujours facile en pratique. En effet, dans le cadre de la stimulation hors FIV/ICSI, le but est d’obtenir 1 à 2 follicules dominants. Le seuil de réponse pour la croissance monofolliculaire peut être difficile à trouver : il est souvent élevé, mais l’augmentation des doses doit être lente et prudente pour éviter un développement multifolliculaire, fréquent dans ces situations et pourvoyeur de grossesses multiples. Lorsque la croissance folliculaire est obtenue sous stimulation, il faut dans certains cas réduire la dose de gonadotrophines (« step down ») pour limiter la croissance multifolliculaire. Par ailleurs, outre la difficulté possible à manier cette induction monofolliculaire, il a été décrit dans de rares études comportant très peu de cas un pronostic moins bon sur les issues de grossesse en particulier dans les déficits hypophysaires combinés(2). Une étude multicentrique française portant sur 28 patientes avec déficits multiples rapporte des issues de grossesse semblables à celles de la population générale sauf dans les cas des grossesses multiples(3). Le pronostic des grossesses dépend aussi de la pathologie sous-jacente possiblement inductrice de facteurs de risque tel que le diabète, l’HTA, l’obésité, fréquents dans certaines pathologies hypothalamo-hypophysaires. Enfin, l’état ovarien initial de l’hypogonadisme hypogonadotrope complet est trompeur, car il peut évoquer une insuffisance ovarienne sous-jacente : le CFA initial est peu fiable car les follicules sont trop petits pour être visibles, les ovaires sont diminués de volume et l’AMH est basse. Rapidement la stimulation par gonadotrophines permet de révéler la réserve folliculaire de la patiente, et normalise les taux d’AMH(4). Stimulation de l’ovulation dans le cadre d’une AmP lourde type FIV/ICSI Les facteurs d’infertilité associés tel que l’oligoasthénotératospermie, la pathologie tubaire ou l’endométriose sévère nécessitent de passer d’emblée en AMP lourde. Les traitements de stimulation ovarienne sont alors proches de ceux utilisés chez les femmes normo-ovulantes. Il existe deux particularités : l’utilisation d’une gonadotrophine ayant une activité FSH et LH associée (cf. ci-dessus) et l’absence de besoin d’un agoniste ou antagoniste du GnRH pour bloquer le pic ovulatoire de LH. L’agoniste du GnRH ne peut également pas être utilisé pour déclencher l’ovulation en l’absence d’une hypophyse fonctionnelle. Conclusion  En cas d’hypogonadisme hypogonadotrope, Il faut bien évaluer l’étiologie et typer l’hypogonadisme afin d’adapter la prise en charge. Les gonadotrophines sont efficaces dans les déficits hypophysaires, dans l’induction de l’ovulation simple ou si besoin d’AMP lourde, mais de maniement parfois délicat. Le pronostic sur les issues de grossesses reste dans l’ensemble excellent.

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