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Cancérologie

Publié le 04 mai 2010Lecture 9 min

Prise en charge chirurgicale du cancer de l’endomètre. Protocoles thérapeutiques

J.-S. KRAUTH, F. GOLFIER, D. RAUDRANT, CHU Lyon Sud
La prise en charge chirurgicale du cancer de l’endomètre fait actuellement l’objet de nombreuses controverses, en particulier en ce qui concerne l’intérêt des curages ganglionnaires aux stades précoces. Pour le cancer endométrioïde au stade I préopératoire, si la lymphadénectomie pelvienne est discutée chez les patientes à bas risque, elle est indiquée à partir du risque intermédiaire. La lymphadénectomie lombo-aortique se justifie chez les patientes à haut risque ou en cas d’atteinte ganglionnaire pelvienne. La prise en charge laparoscopique des cancers endométrioïdes au stade précoce est autorisée. La biopsie du ganglion sentinelle est en cours d’évaluation dans cette indication. En ce qui concerne les cancers non endométrioïdes, une exploration péritonéale complète et une lymphadénectomie pelvienne et lombo-aortique sont préconisées.
La stadification du cancer de l’endomètre est chirurgicale depuis 1988 (FIGO). L’intervention type consiste à réaliser une hystérectomie extrafasciale, une annexectomie bilatérale et un curage ganglionnaire pelvien et éventuellement lomboaortique en fonction du risque lié à la pathologie et de l’état de santé de la patiente. En réalité, la littérature fait état d’une grande variabilité de prise en charge chirurgicale. Celle-ci est, bien sûr, liée à la patiente qui peut présenter des comorbidités limitantes, mais également au chirurgien qui dispose de recommandations peu précises et d’une littérature en désaccord.   Chirurgie des cancers endométrioïdes de l’endomètre au stade I préopératoire C’est la situation la plus fréquente : 80 % des cancers de l’endomètre sont de type endométrioïde et 70 % d’entre eux sont diagnostiqués au stade I préopératoire. La survie à 5 ans de ces patientes est globalement supérieure à 80 %. Il existe une grande disparité de survie dans cette population, variant de 50 à 95 % à 5 ans, qui s’explique par le fait que certaines patientes sont en fait d’authentiques stades III en raison d’un envahissement ganglionnaire. Ces patientes pourraient potentiellement bénéficier des curages ganglionnaires et des traitements adjuvants.   Risque d’envahissement ganglionnaire (N+) L’atteinte ganglionnaire est la plus fréquente des atteintes extra-utérines. La survie des patientes N+ pelvien ou lomboaortique est comprise entre 44 et 52 %. L’atteinte lombo-aortique semble être le facteur de plus mauvais pronostic. Le risque d’envahissement ganglionnaire est globalement de 10 %. Il est de 3 à 5 % chez les patientes à bas risque (stades Ia et Ib grades 1 et 2) et atteint 18 à 20 % chez certaines patientes à haut risque (stade Ic et grade 3).   Rôle thérapeutique de la lymphadénectomie Plusieurs séries rétrospectives ont mis en évidence un bénéfice en survie des curages ganglionnaires. Ces séries souffrent d’un biais de sélection (les patientes en plus mauvais état n’ont pas eu la lymphadénectomie) et d’un biais lié à la migration de stade des patientes N+ (les stades I du groupe curage sont comparés à des stades III occultes n’ayant pas eu de curage). Deux études randomisées récentes ne mettent pas en évidence de bénéfice en survie. Néanmoins, dans ces études, les patientes N+ n’ont pas eu systématiquement une prise en charge optimale au niveau de la chaîne lombo-aortique et sur le plan des traitements adjuvants.   Intérêt du curage lombo-aortique Environ 50 % des patientes N+ en pelvien sont N+ en lomboaortique. Un groupe à haut risque d’atteinte lombo-aortique est actuellement identifié. Il s’agit des patientes au stade Ic et grade 3 préopératoire (éventuellement les Ib dont la tumeur mesure plus de 2 cm). Par ailleurs, en cas d’atteinte lomboaortique, il a été mis en évidence jusqu’à 77 % d’atteinte sus-mésentérique sans pour autant qu’il y ait d’atteinte sous-jacente. Certains auteurs retrouvent jusqu’à 28 % d’atteinte des veines ovariennes en cas de N+ lombo-aortique.   Place actuelle de la lymphadénectomie dans les cancers endométrioïdes au stade I préopératoire Au total, certaines patientes à bas risque (stades Ia et Ib grades 1 et 2) ne semblent pas bénéficier de la lymphadénectomie. Le risque d’envahissement ganglionnaire de 4 % dans cette population est-il acceptable ? Pour certains auteurs, il justifie encore la réalisation d’un curage pelvien systématique. La lymphadénectomie pelvienne se justifie pleinement chez les patientes ayant un risque intermédiaire ou haut, sur des arguments de fréquence d’envahissement ganglionnaire, bien que le rôle thérapeutique de la lymphadénectomie ne soit pas prouvé. Par ailleurs, une lymphadénectomie lombo-aortique devrait être associée chez les patientes à haut risque (stade Ic ou Ib ≥ 2 cm et grade 3) ou N+ pelvien. Dans ce cas, elle doit être complète, infra- et sus-mésentérique et associée à l’exérèse des pédicules ovariens.   Apport de la lymphadénectomie pour guider le traitement adjuvant La chimiothérapie semble pouvoir apporter un bénéfice aux patientes N+. La réalisation d’essais thérapeutiques randomisés et bien dimensionnés est cependant nécessaire pour l’affirmer. En ce qui concerne la radiothérapie adjuvante, la lymphadénectomie pourrait permettre d’éviter de sous-traiter les N+ (50 % de N+ lombo-aortique) et de ne pas sur-traiter les N-. En effet, dans cette population de N-, le bénéfice en survie de la radiothérapie n’est pas prouvé et l’association lymphadénectomie et radiothérapie est génératrice de complications. Il semble cependant difficile de se passer de radiothérapie chez un certain nombre de patientes à risque intermédiaire et haut, car elle permet de diminuer le taux de récidives. Une solution serait d’évaluer la curiethérapie exclusive dans cette situation.   Place de la chirurgie mini-invasive La technique du ganglion sentinelle est en voie d’évaluation dans cette indication. Un certain nombre de questions ne sont pas résolues. En particulier, le site d’injection idéal fait toujours débat : sous-séreux (intramyométrial), intracervical ou sous-muqueux. L’injection intracervicale profonde semble être la plus facile à mettre en oeuvre, mais l’injection sous-muqueuse pourrait permettre une meilleure cartographie, en particulier au niveau lombo-aortique. La validation de la technique passera par la réalisation d’essais cliniques auxquels il est souhaitable de participer.   La chirurgie coelioscopique Le traitement coelioscopique des cancers endométrioïdes au stade précoce a été validé par plusieurs essais randomisés et une métaanalyse récente. Au total, pour un taux de récidives similaire, la coelioscopie permet de réduire les pertes sanguines, le taux de complications et la durée d’hospitalisation au prix d’une durée opératoire plus longue. Les limites du traitement coelioscopique sont liées à l’état de santé de la patiente et à la nécessité de pouvoir extraire l’utérus sans le morceler. La coelioscopie ne doit pas être utilisée en cas d’atteinte séreuse ou ovarienne et en présence d’une histologie à risque.   Cancers endométrioïdes aux stades avancés Au stade II évident préopératoire, tous les auteurs s’accordent à préconiser la réalisation d’une colpo-hystérectomie élargie. Aux stades plus avancés, le traitement chirurgical complet avec exérèse des adénopathies métastatiques semble toujours bénéfique s’il est possible.   Cancers non endométrioïdes Les cancers à cellules claires et les cancers séropapillaires de l’endomètre relèvent d’un traitement chirurgical spécifique en raison de la grande fréquence de découverte à un stade avancé avec envahissement ganglionnaire. Une lymphadénectomie pelvienne et lombo-aortique est préconisée quel que soit le degré d’envahissement myométrial. Une exploration péritonéale soigneuse sera réalisée, avec biopsies et omentectomie (au moins pour la forme séropapillaire). La chirurgie de cytoréduction semble bénéfique aux stades avancés.   Chirurgie des récidives pelviennes Peu de données objectives sont disponibles dans la littérature. Après s’être assuré du caractère isolé de la récidive, il est possible de proposer une exentération pelvienne ou une vaginectomie et paramétrectomie.   Chirurgie des patientes jeunes La préservation ovarienne semble possible au stade I de bas grade sous couvert d’une inspection soigneuse (1 % d’atteinte ovarienne).   En pratique La chirurgie reste la pierre angulaire du traitement du cancer de l’endomètre. Elle doit être adaptée à l’état de santé de la patiente, mais semble avoir toujours un intérêt, quel que soit le degré d’évolution de la pathologie. Les cancers à cellules claires et les cancers séropapillaires méritent un traitement chirurgical spécifique par hystérectomie non conservatrice, curages pelvien et lombo-aortique, biopsies péritonéales et omentectomie. En ce qui concerne les cancers endométrioïdes, la réalisation d’une hystérectomie extrafasciale non conservatrice est toujours recommandée. La lymphadénectomie pelvienne chez les patientes à bas risque est discutée, mais doit être réalisée chez les patientes à risque intermédiaire ou haut, en raison d’un risque non négligeable d’envahissement ganglionnaire (5- 20 %). La lymphadénectomie lombo-aortique infra- et susmésentérique se justifie chez les patientes à haut risque (Ic et grade 3) et en cas d’atteinte ganglionnaire pelvienne. POINTS À RETENIR En ce qui concerne les cancers endométrioïdes au stade précoce : • Certaines patientes à bas risque (stades Ia et Ib grades 1 et 2) ne semblent pas bénéficier de la lymphadénectomie. Le risque d’envahissement ganglionnaire de 4 % dans cette population est-il acceptable ? Pour certains auteurs, il justifie encore la réalisation d’un curage pelvien systématique. • La lymphadénectomie pelvienne se justifie pleinement chez les patientes ayant un risque intermédiaire ou haut, sur des arguments de fréquence d’envahissement, bien que le rôle thérapeutique de la lymphadénectomie ne soit pas prouvé. • Par ailleurs, la réalisation d’une lymphadénectomie lombo-aortique se justifie chez les patientes à haut risque (stade Ic ou Ib ≥ 2 cm et grade 3) ou N+ pelvien. Dans ce cas, elle doit être complète infra- et sus-mésentérique et associée à l’exérèse des pédicules ovariens.

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