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Publié le 23 oct 2007Lecture 6 min

Hémorragie chez une femme à terme en travail : du quotidien banal au drame

J. BERTHET, Saint-Junien

Le symptôme « saignement vaginal » en cours de travail chez une femme à terme est dangereux : d’abord parce qu’il est banal, ensuite parce que l’amélioration des suivis des grossesses a permis d’éliminer la plupart des évènements inopinés. Cependant, entre nos humanités et la pratique obstétricale moderne est apparue l’obligation de résultat. La question n’est donc plus diagnostique mais pragmatique avec une nécessité de rapidité.

 
 Nous avons dû apprendre, lors de nos études, deux grandes catégories étiologiques de saignements vaginaux : – des étiologies d’origine maternelle : les hémorragies cervicales ou vaginales, l’hématome décidual et la rupture utérine ; – des étiologies d’origine ovulaire : le placenta praevia, l’hématome rétroplacentaire, le maelena intrautérin et le syndrome de Ben Kiser. Ce type d’enseignement pragmatique n’a pas été dispensé à chacun, en dehors de la présence en salle de naissance.   Le danger immédiat Le danger immédiat est l’état maternel. Si la mère est en état de souffrance, l’enfant le sera aussi dans des délais très brefs. Il n’est pas utile de rappeler les caractéristiques du choc obstétrical : brutal car longtemps compensé, annoncé par une tachycardie, une soif et une angoisse. Dans les grands centres, la prise en charge maternelle est systématiquement dévolue aux anesthésistes- réanimateurs. Ces derniers y sont formés aux particularités de l’obstétrique où le climat change aussi vite qu’en mer tropicale. Malheureusement, ils sont parfois issus d’autres lignes de garde, en raison de RTT ou de remplacements. Dans ces cas-là, comme dans de moins grands centres, il est du devoir de l’équipe obstétricale d’assurer l’intendance : recherche rapide dans le dossier d’une étiologie probable, monitorage des constantes, oxygénation, mise en place d’une voie veineuse centrale, remplissage et, si possible, interrogatoire. Si l’hémorragie s’accompagne d’une douleur maternelle intense, il est éthiquement indispensable de la calmer au plus tôt malgré les inconvénients que cela peut, éventuellement, représenter. L’état foetal est à prendre en compte. Les décrets de périnatalité d’Octobre 1998 font obligation de la disponibilité d’un échographe en salle de naissance : le temps de recherche par l’ERCF, en première intention, est rédhibitoire. Trois situations peuvent alors se présenter : – il n’y a plus d’activité cardiaque foetale ; – il existe une bradycardie permanente ou, à l’ERCF, un tracé pre-mortem ; – l’état foetal est rassurant.   L’enfant est mort Pourquoi ? Quelle est la situation ? Quel est l’état des membranes ? Les membranes sont intactes Il ne peut s’agir que : • d’un HRP avec, quand même d’autres symptômes cliniques, comme en cas de rupture utérine. Le pronostic maternel est, peutêtre, à reconsidérer ; • le placenta prævia est bien peu probable ; • d’une autre cause sans rapport avec le saignement. Les membranes sont rompues Bien sûr tout est possible, la procidence du cordon ne peut théoriquement, cliniquement pas échapper. Néanmoins, l’hypothèse de la rupture d’un vasa prævia est probable, mais ne sera confirmée que par l’anatomopathologie. La situation n’est pas simple à gérer sur le plan psychologique. L’important est de ne pas prendre de risque maternel, ni de compromettre son pronostic à long terme. Peut-être peut-il rester dans ces cas, une place pour la césarienne vaginale ? Suivant le diagnostic étiologique envisagé, il peut être prudent d’organiser au plus tôt le transfert vers une structure autorisant une embolisation maternelle en cas de nécessité.   L’enregistrement du rythme cardiaque foetal est normal Cela permet d’éliminer tous les diagnostics très pessimistes. Quelle est l’origine du saignement ?  Pour Lansac, les saignements des voies génitales inférieures sont présents dans environ 10 % des accouchements. Ils ne prennent jamais des proportions importantes. Ils doivent néanmoins demeurer un diagnostic d’élimination.   Les placentas postérieurs bas insérés peuvent échapper à l’échographie standard, plus orientée vers le dépistage obsessionnel d’anomalies foetales. En particulier, un cotylédon aberrant est toujours possible. Le diagnostic est volontiers pragmatique : le saignement est tari par la rupture des membranes.  Il en est de même pour l’hématome décidual marginal qui est anecdotique et, finalement, une forme très bénigne du cas précédent.  L’apparition de sang à la rupture des membranes ne peut faire évoquer que l’exceptionnel maelena intra-utérin : en effet, une lésion d’un vasa prævia lors de la rupture s’accompagne immédiatement d’une souffrance foetale aiguë. Dans tous ces cas, il y a le temps de la réflexion. L’amnioscopie peut éventuellement être une aide non-négligeable pour éviter de transformer un incident en accident : cotylédon postérieur aberrant associé à un vasa prævia qui parlera lors de la rupture des membranes. L’échographie peut être intéressante, surtout par voie vaginale. L’important n’est-il pas de diriger le travail pour conclure au plus tôt avec une surveillance foetale de tous les instants ?   Le tracé cardiaque foetal est de type pre-mortem Dans le cas de bradycardie permanente, rythme plat, etc., on peut envisager : – un HRP grade 2 de la classification de Sher ; – une rupture utérine ; – un Ben Kiser. Cliniquement, les deux premières hypothèses devraient être parlantes. Seule, la rupture de vasa prævia est asymptomatique pour la mère. Cette pathologie est rare. Ses facteurs de risque sont confus : cotylédon aberrant, placenta bi-partita, circumlata. Sa prévention passe par le dépistage d’un gros trajet vasculaire sur les membranes avant la rupture de ces dernières. L’amnioscopie tombant en désuétude etn’étant pas toujours performante, il a été proposé la pratique du Doppler couleur par voie vaginale comme moyen de dépistage. Lorsque le vaisseau est rompu, la survie de l’enfant se compte en minutes, puis en possibilité d’une transfusion immédiate dès son extraction. La question à se poser est alors celle des moyens disponibles pour pouvoir extraire l’enfant avant l’apparition de séquelles irréversibles ou de décès. En cas d’HRP ou de rupture utérine, les signes maternels vont, de toutes les façons, imposer la laparotomie dans les meilleurs délais. En cas de syndrome de Ben Kiser, il est bien difficile d’accepter de ne rien faire, même si l’on sait pertinemment que les délais entre indication et transfusion ne laissent que très peu de chance. Conclusion Toutes ces situations sont rares. Certaines peuvent être prévenues par un suivi rigoureux. Il semble, cependant, au fil des années passées en salle de naissance que, précisément, de plus en plus souvent, ce sont lespatientes qui devraient bénéficier d’un suivi rigoureux qui ne s’y plient pas… Les moyens, voire les motivations des PMI, ne sont pas toujours à la hauteur du secteur géographique qu’elles ont à couvrir. Enfin, est-il bien raisonnable de substituer, dans chaque maternité du territoire, la pratique de l’amnioscopie, certes cliniquement pas toujours simple, par celle du Doppler couleur par voie vaginale ? Dans les 10 à 15 ans à venir, qui va se retrouver en première ligne dans les dernières maternités où l’on accouchera encore par voie basse ? Avec quelle formation pragmatique ?  

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