publicité
Facebook Facebook Facebook Partager

Sexologie

Publié le 19 mar 2014Lecture 4 min

Femmes éternelles

Philippe BRENOT, Psychiatre, directeur des enseignements de Sexologie et Sexualité Humaine à l’université Paris Descartes
« La femme n’existe pas », soutient Philippe Sollers. Accord parfait avec le penseur solitaire : la femme n’existe pas, n’existent que LES femmes dans leur grande diversité. Cette distinction, qui peut paraître subtile à certains, est en fait extrêmement profonde, car elle recouvre des modes différents de perception et de compréhension des personnes, l’acceptation de la variété des personnalités, mais également le dépassement d’une discrimination à travers les stéréotypes de genre. La tentation, qui n’est pas si rare, de réduire toutes les femmes à LA femme, relève d’une sorte d’amalgame stéréotypé auquel les femmes ne pourraient échapper. On pourrait en dire tout autant des hommes. Cette façon de voir, un peu ancienne, réduisant les individus à une catégorie, est largement dépassée pour bien comprendre la diversité des valeurs, des cultures et des personnalités. Au-delà de cette diversité, certains traits subsistent de la longue période de la domination masculine qui a assigné les femmes soit à un rôle de mère soit à celui de séductrice, dans la dichotomie caricaturale qui imposait aux femmes de choisir entre deux attitudes : la maman ou la putain ! Une façon de nier la dimension sexuelle chez l’épouse légitime, seule valide aux yeux bienséants de la société. Stéatopygie et stéatomérie Si nous revenons aux plus anciennes représentations humaines, nous pouvons remarquer combien cette dichotomie existe déjà. Dans la préhistoire occidentale, les premières femmes (maladroitement appelées Vénus à une époque où l’on interprétait ces représentations comme des « déesses-mères ») sont en majorité des silhouettes multipares, c’est-àdire représentant des femmes multiparturiantes et allaitantes (figure 1). Figure 1. Vénus de Willendorff (Allemagne). Or, à la fin du XIXe siècle et au début du XXe, on a longtemps parlé de figurines stéatopyges, en raison de la similitude morphologique apparente avec certaines populations d’Afrique du sud, Boschimans ou Hottentots. Il faut cependant savoir que la stéatopygie est une protubérance fessière très particulière (figure 2) que l’on retrouve chez des populations adaptées aux régions désertiques et qui constitue, sous forme d’une masse graisseuse, un réservoir d’eau un peu à l’image de la bosse des chameaux ou des dromadaires. Cette stéatopygie avait marqué les esprits européens du XIXe siècle en raison de la venue à Londres, puis Paris, de la malheureuse Saartjie Baartman (1789-1815) dont le moulage complet du corps sera exposé au Musée de l’homme jusqu’en 1974 (!), suscitant des jugements de valeur qui ne sont plus de notre époque. Le film Vénus noire, d’Abdellatif Kechiche en 2010, qui retrace son histoire, est emblématique à ce sujet. Figure 2. Saartjie Baartman, la « Vénus hottentote ».    Multiparité En réalité, ces statuettes féminines (très nombreuses dans la préhistoire occidentale, près de 200 statuettes du Gravettien au Magdalénien, -29 000 à -12 000 ans) ne sont en rien stéatopyges, mais plutôt stéatomères, c’est-à-dire présentant un élargissement latéral des parties molles du bassin que l’on observe dans la multiparité, auquel a pu se surajouter l’épaisseur d’un panicule adipeux protecteur dans cette période du paléolithique supérieur, dernière époque glaciaire, où l’inlandsis, sol gelé en permanence, descendait du pôle jusqu’au niveau de la Loire. Figure 3. Femme lascive de la Madeleine (Dordogne).   Ces magnifiques statuettes, ou silhouettes, féminines nous renvoient tout d’abord à la représentation de femmes symbolisant l’enfantement, la maternité et peut-être la fécondité ; mais également à des corps très « féminins », lascifs, voluptueux (figure 3). En quelque sorte déjà l’archétype de la maman et de la putain !

Attention, pour des raisons réglementaires ce site est réservé aux professionnels de santé.

pour voir la suite, inscrivez-vous gratuitement.

Si vous êtes déjà inscrit,
connectez vous :

Si vous n'êtes pas encore inscrit au site,
inscrivez-vous gratuitement :

Version PDF

Articles sur le même thème

Vidéo sur le même thème