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Covid-19

Publié le 30 mar 2021Lecture 6 min

Conséquences maternelles et néonatales de la Covid-19 : retour sur une année 2020 mouvementée

Jérémie MATTERN, Alexandra BENACHI, Alexandre J. VIVANTI, Service de gynécologie obstétrique, CHU Antoine Béclère, Université Paris-Saclay, AP-HP, Clamart
Conséquences maternelles et néonatales de la Covid-19 : retour sur une année 2020 mouvementée

Le 31 décembre 2019, les autorités sanitaires chinoises informent l’OMS de l’apparition dans la province de Wuhan d’un nouveau coronavirus. D’abord baptisé 2019-nCoV, puis SARS-CoV-2, il est responsable de l’anthropozoonose (maladie transmise à l’homme par des vertébrés) Covid-19. Ce virus se diffuse rapidement à l’ensemble de la planète et les premiers clusters français sont signalés à la fin du mois de février 2020.
L’état d’épidémie active sur le territoire est déclaré le 14 mars. À la fin de la première vague, la séroposivité au SARS-CoV-2 des patientes ayant accouché pendant la pandémie était estimée entre 4 et 8 % en France(1,2).

Recommandations initiales lors de la première vague Les recommandations initiales dont nous, gynécologues-obstétriciens, disposions ont été publiées par le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) et par le Conseil national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF), à la mi-mars 2020. On pouvait alors lire que « S’agissant des femmes enceintes, en l’absence de données disponibles, il [était] recommandé […] un diagnostic par RT-PCR dès la suspicion clinique et des mesures de distanciation sociale et de limitation des activités professionnelles, culturelles, sociales non essentielles […] à partir du troisième trimestre de la grossesse. » Le 16 mars 2020, le CNGOF précisait que « les connaissances à l’heure actuelle [étaient] très limitées ». En effet, les premières données scientifiques disponibles lors de l’extension de l’épidémie au Grand-Est français puis à l’Île-de-France étaient restreintes et provenaient exclusivement des premières séries de cas en Chine. Les données italiennes ne sont parues que plus tard. Ces séries rétrospetcives comportaient de très faibles effectifs. Très peu d’informations étaient fournies. Nous y apprenions que les taux de césariennes et de prématurité étaient très importants. Par ailleurs, les premières descriptions de tableaux cliniques chez les patientes enceintes semblaient être identiques avec celles des autres groupes de patients. La grossesse : un facteur de risque ? À l’heure du confinement, décrété le 16 mars 2020 en France, les questions restaient nombreuses. Si les premières données laissaient penser que les femmes enceintes n’étaient pas plus à risque de développer une forme grave de l’infection, l’expérience acquise avec d’autres infections respiratoires, au premier rang desquelles la grippe, incitait à la prudence. En effet, le risque d’hospitalisation en soins intensifs lors d’une grippe est multiplié par 6,5 pendant une grossesse(3). Concernant la Covid-19, les premières réponses n’ont été obtenues qu’avec les publications, en deuxième partie de pandémie, de premières séries multicentriques(4), notamment françaises(5). Il s’agissait encore de séries observationnelles rétrospectives ; cependant, il apparaissait que les patientes enceintes, ou en post-partum immédiat, étaient plus à risque d’hospitalisation en réanimation que les femmes du même âge non enceintes (majoration du risque d’un facteur 2). Cet excès de morbidité était également lié à d’autres paramètres : les patientes âgées de plus de 35 ans souffrant d’obésité et ayant des comorbidités préexistantes formaient les sous-groupes les plus à risque. Sans forcément nécessiter une hospitalisation en réanimation, un certain nombre de patientes ont dû bénéficier d’une oxygénothérapie à l’hôpital, compliquant de facto le cours de la grossesse. Il est important de noter que ce surrisque a été constaté au sein de populations de femmes symptomatiques au moment du diagnostic. En effet, le manque de réactifs de RT-PCR lors de la première vague épidémique a restreint les possibilités diagnostiques initiales.Plus tard, avec les possibilités de dépistage plus larges, il a semblé que les femmes enceintes asymptomatiques ou paucisymptomatiques lors d’un diagnostic par RT-PCR étaient moins enclines à développer des formes graves de la maladie. La question des symptômes présentés par les patientes enceintes est également restée sans réponses pendant un certain temps. Les données publiées sur les patientes infectées symptomatiques ont permis de les préciser(6). La symptomatologie des femmes enceintes est globalement proche de celle observée en population générale. On observe classiquement une asthénie importante avec des myalgies, associée à une toux fébrile. L’anosmie/agueusie est présente aussi chez une partie des patientes. Il a également été observé des anomalies biologiques telles que des lymphopénies, des anémies inflammatoires, des thrombopénies ainsi que des allongements du TCA. Plus rarement, des tableaux de coagulopathies sévères ont été observés. Les anomalies du bilan biologique au moment du diagnostic méritent une attention particulière. En effet, il pourrait exister une corrélation entre ces perturbations et la probabilité d’évolution vers une forme sévère. D’importantes conséquences obstétricales liées à la pandémie Si en valeur absolue, le nombre de passages en réanimation de femmes enceintes peut sembler faible en France, les conséquences de la pandémie sur l’ensemble des naissances commencent à être mieux connues fin 2020. En effet, en raison du retentissement respiratoire de l’infection sur la mère et de la nécessité d’hospitalisation pour oxygénothérapie, voire de ventilation mécanique, les patientes infectées lors de la première vague épidémique du mois de mars 2020 ont plus accouché prématurément que les patientes non infectées(7). Cette prématurité était médicalement induite pour permettre des soins optimaux à la mère. Les enfants naissant prématurés étant plus à risques d’être hospitalisés en soins intensifs, la morbidité liée à ces prématurités « médicales » est importante. Les admissions en soins intensifs ont pu atteindre jusqu’à 20 % des enfants nés de femmes infectées lors de l’accouchement. De nombreuses questions restent en suspens concernant l’impact de la Covid-19 sur les issues obstétricales. À l’heure actuelle, l’impact du virus sur les taux de prééclampsie et d’hémorragie du postpartum chez les femmes malades reste débattu. De nouvelles études seront nécessaires pour ré pondre à ces questions. De même, des études sont en cours pour évaluer l’impact de la Covid-19 et du confinement sur la santé mentale des femmes enceintes en 2020. En plus des complications liées à la prématurité, un certain nombre de nouveau-nés ont été infectés. Une revue systématique(8) de la littérature comportant 74 articles a permis d’en identifier 176(8). Ces nourrissons ont été infectés par le virus lors de la première vague pandémique mondiale. Chez ces nouveau-nés, près des trois quarts ont été infectés en post-partum et ceux-ci étaient majoritairement paucisymptomatiques. Les symptômes chez les nouveau-nés sont essentiellement respiratoires avec de la fièvre. Une présentation neurologique et gastro-intestinale a néanmoins été constatée chez 20 à 30 % des nourrissons infectés. Ces nouveau-nés ont principalement été infectés en post-partum lors des contacts avec leurs mères infectées. Les infections néonatales après 72 heures de vie étaient fortement associées à la non-séparation de la mère et de l’enfant. Des cas de contamination in utero par voie transplacentaire, bien que rares, ont été décrits(9). Il est important de préciser que la morbidité néonatale liée au Covid-19 reste principalement la conséquence de la prématurité induite et non par infection directe des nouveau-nés. Même si le risque d’infection néonatale est réel, le message délivré aux patientes doit être rassurant, car il s’agit d’un événement peu fréquent et dont les conséquences, du moins à court terme, semblent être modérées. Évolution des traitements et perspectives Au cours de la pandémie et de ses différentes vagues, la mise en évidence de l’efficacité de certaines thérapeutiques ainsi que l’amélioration de la compréhension de l’histoire naturelle de la maladie chez les femmes enceintes ont progressivement permis de limiter la prématurité induite lors de la prise en charge de patientes infectées après les mois de mars-avril. En effet, lors de la première vague épidémique, l’oxygénorequérance au-delà de 15 l/min ou l’épuisement respiratoire représentaient une indication de ventilation invasive et ainsi de naissance. La diffusion de nouvelles techniques d’oxygénation (oxygène à très haut débit) ainsi que l’utilisation de la dexaméthasone chez des patientes en situation de décompensation respiratoire ont par la suite permis, pour certaines patientes à haut risque, de passer un cap et de surseoir à une indication d’extraction fœtale. La vaccination représente la meilleure perspective dans la lutte contre la Covid-19. Malheureusement, les autorités sanitaires françaises excluent à ce jour les femmes enceintes de toutes les recommandations vaccinales. De nombreuses voix s’élèvent actuellement pour réclamer l’inclusion des femmes enceintes en France dans les études et recommandations vaccinales(10). Les femmes enceintes aux 2e et 3e trimestres représentent une population à risque d’évolution défavorable lors d’une infection par le SARS-CoV-2 : le bénéfice attendu d’une vaccination sur les femmes enceintes est élevé.

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