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Société

Publié le 29 juin 2021Lecture 6 min

Quelle rééducation dans le traitement de l’hyperactivité vésicale idiopathique ?

S. GALLIAC ALANBARI, Institut de pelvi-périnéologie de Paris

Le « syndrome clinique d’hyperactivité vésicale » (overactive bladder syndrome) ou « syndrome urgenturie-pollakiurie » (urgency-frequency syndrome) est défini par la survenue d’urgenturies avec ou sans incontinence urinaire, habituellement associées à une pollakiurie ou une nycturie.
Ce syndrome est évocateur d’une hyperactivité détrusorienne mise en évidence par un examen urodynamique, mais non spécifique car il peut également être dû à d’autres types de dysfonctionnement du bas appareil urinaire (figure 1).

Par ailleurs, le terme de syndrome clinique d’hyperactivité vésicale suppose qu’il n’y ait pas d’infection urinaire ni de pathologie locale organique évidente (tumeur etc.). Épidémiologie (figure 2) La prévalence de l’HAVI a été estimée en 2008 à 10,7 % de la population mondiale et devrait atteindre 20 % en 2018(1). Dans une étude transversale sur une population américaine de 2 485 hommes et 2 877 femmes(2), Sexton et al. ont observé en 2011 une prévalence plus élevée chez les femmes, à 46,9 % (vs 40,4 % chez les hommes). Une étude longitudinale prospective sur 3 ans de Donaldson et al.(4) en 2006 a conclu que la prévalence de l’HAVI augmente avec l’âge, surtout à partir de 40 ans chez la femme, avec un pic à 60 ans puis à 80 ans. La rééducation périnéo-sphinctérienne constitue un traitement de première intention ; les niveaux de recommandation de grade sont peu élevés et les protocoles essentiellement basés sur l’expérience ; elle associe plusieurs techniques (figure 3). Éxercices du plancher pelvien (Epp) Ils ont pour objectifs de retenir les urines, différer la miction et inhiber le détrusor. Ils reposent sur des contractions de longue durée et stables, en respectant un temps de repos double du temps de travail (W : 12 s/repos 24 s déclenche le réflexe 3 d e Mahony)(4,5). La puissance de la contraction n’est pas prioritaire. La patiente doit maîtriser ces contractions en positions et situations de stress ou d’urgenturie, anticiper la survenue du stimulus. Pour obtenir une contraction des MPP, on peut demander une contraction volontaire avec des images telles que « retenez une envie d’uriner », « retenez un gaz », « serrez votre vagin ». La co-contraction abdominopelvienne par le TrA peut être recherchée(6-8). Une contraction réflexe tonique peut être sollicitée grâce aux techniques posturales(9-11). Les techniques hypo-pressives peuvent être proposées (Caufriez). L’ESF ou prise de conscience de la contraction nécessite un protocole spécifique avec une fréquence de 50 Hz. Un apprentissage avec suivi est nécessaire : l’apprentissage de ces contractions est significativement plus efficace lorsque ce travail est supervisé par un rééducateur(12). Toutefois, 30 % des femmes ne sont pas capables de contracter les releveurs, 25 % vont réaliser une inversion de commande (poussée)(13) ; seulement 49 % ont une contraction efficace(14). Il est difficile de formuler des recommandations cliniques tant les protocoles des traitements sont différents. Electrostimulation fonctionnelle (ESF) Mécanisme de la stimulation électrique La simulation du nerf pudendal entraîne une contraction directe du plancher pelvien. Par l’intermédiaire de la moelle épinière, une simulation réflexe du nerf pelvien est mise en jeu (ce qui entraîne une inhibition réflexe du détrusor : reflexe 3 de Mahony). Afin de déclencher cette réaction réflexe le protocole doit être spécifique : courant biphasique à moyenne nulle, fréquence de 1 à 1 hz en continu. (Plevnik). Les protocoles sont très différents : de 2 fois/semaine à 2 fois/jour pendant 20 minutes pendant 3 à 6 mois(15). Résultats de l’ESF : – elle est efficace à différents degrés sur la force musculaire, l’ incontinence et l’urgenturie(16-17) ; – elle est significative comparativement à l’absence de traitement(16,18,19) ; – elle est non significative comparativement aux exercices du plancher pelvien(16,20,21) et aux traitements pharmacologiques(20-23) ; – elle peut participer à l’augmentation de la capacité vésicale(24) ; – elle vise à renforcer le tonus des muscles du plancher pelvien et le sphincter strié)(25). Stimulation tibiale postérieure (figure 4) Le nerf tibial postérieur est un nerf mixte composé de fibres nerveuses issues des segments L4-S3 qui participent à l’innervation périnéale et vésicale. Le principe de sa simulation consiste à simuler ses afférents périphériques afin d’entraîner une modulation du réflexe mictionnel. La tolérance de la simulation tibiale postérieure est satisfaisante et l’absence d’effet secondaire renforce son intérêt. Cette approche a été validée dans plusieurs pathologies : hyperacivité détrusorienne neurogène et non neurogène(26) ; HAV d’origine neurologique(27,28) ; HAV d’origine non neurologique (urgenturie-pollakiurie) chez l’adulte(29) ou l’enfant(30) ; syndrome dysurique chez l’adulte(31) ou chez l’enfant(32) (tableaux 1 et 2). Biofeedback Quatre buts sont recherchés par le travail du biofeedback (figure 5). A partir d’une contraction active : – enregistrer et en retransmettre « l’image » ; – dissocier le travail du périnée sans faire travailler les muscles parasites et améliorer les performances : tenue, force, vitesse ; – renforcer, en modulant les différents types de travail dont on a besoin, contraction forte et de courte durée, contraction moyenne et de longue durée, passage d’un type à l’autre, vitesse d’obtention du résultat souhaitée ; – optimiser et rentabiliser, en reproduirant avec une qualité égale ces contractions sans regarder l’écran, debout en verrouillage périnéal, et en déstabilisation. Traitement comportemental Le traitement comportemental(34) regroupe l’éducation du rythme mictionnel mais aussi la gestion de la situation de stress (niveau de preuve de grade B(33)). Cette prise en charge comprend 4 étapes : Étape 1 : l’observation porte le plus souvent sur les modifications du mode de vie. Étape 2 : apprentissage. – RPP pour améliorer la qualité de la contraction volontaire : durée et stabilité de la contraction, endurance, adaptation à l’effort, perception de la contraction ; – exercices de respiration abdominale et sus-pubienne ; – reprogrammation vésicale pour différer la miction (syndrome du paillasson) ; – conseils diététiques : équilibre nutritionnel pour éviter la constipation et volume des boissons. Étape 3 : approche cognitive. Étape 4 : exercices à domicile et changements comportementaux. Pour être efficaces, les exercices doivent être répétés plusieurs fois par jour : entraînement musculaire, exercices de respiration, calendrier mictionnel, exercices en situation. Calendrier mictionnel Une période de 2 jours est suffisante en pratique quotidienne pour évaluer des troubles mictionnels fréquents : l’acceptabilité diminue avec la durée du recueil(35). La durée optimale est de 3 jours, selon l’AFU. Différents types de calendriers mictionnels : • niveau 1 (micturition  time chart) : horaires des mictions jour et nuit sur une période d’au moins 24 h ; • niveau 2 (frequency  volume chart) : horaires des mictions + volumes mictionnels jour et nuit pendant au moins 24 h ; • niveau 3 (bladder diary) : – fréquence mictionnelle diurne ; – nycturie : nombre de mictions pendant la période de sommeil : chaque miction doit être précédée et immédiatement suivie d’une période de sommeil ; – fréquence mictionnelle journalière : 1 + 2 ; – diurèse sur 24 h ; – polyurie par une diurèse des 24 h > 2,8 l chez l’adulte ;  – diurèse nocturne mesurée en excluant la dernière miction avant endormissement mais en incluant la 1re du matin ; – volume mictionnel maximal ; – nombre de fuites urinaires et d’urgenturies ; – nombre de protections. Valeurs normales du calendrier mictionnel chez la femme sans trouble mictionnel : – volume mictionnel moyen : 230 à 250 ml ; – fréquence mictionnelle moyenne de 5,7 à 7,3 ; – diurèse moyenne des 24 h de 1 272 à 1 350 ml. Autres modalités thérapeutiques Réduction des apports hydriques Une étude prospective en cross-over sur 110 femmes a montré une diminution de la fréquence des mictions, des fuites et des urgences grâce à une restriction hydrique et une diminution du café(36). Une étude en cross-over de 11 patientes a montré une diminution significative de la fréquence et des urgences mictionnelles lors des phases décaféinées(37). Constipation Une constipation est fréquemment dépistée chez les patients souffrant d’une hyperactivité vésicale. Une constipation colique et/ou rectale, ou un rectocèle peuvent aussi agir comme une épine irritative en majorant l’HAV idiopathique. Traitements et conseils : adaptation posturale (figure 6) ; se présenter au premier besoin ; apport de fibres dans l’alimentation ; bouger, respirer ; si nécessaire traitement par laxatifs. Réduction du poids Une réduction du poids de 9 % sur un indice d’IMC de 32, permet à 6 mois de diminuer les symptômes de l’urgenturie. Estrogénothérapie locale Une estrogénothérapie locale est préconisée chez la femme ménopausée, et permet une diminution des symptômes, malgré l’absence de résultats objectifs au niveau du bilan urodynamique(38). Gestion du stress L’aspect comportemental est une notion vaste allant de l’éducation d’un rythme mictionnel adapté et maîtrisé, à la gestion de la situation de stress qui pourrait modifier le comportement mictionnel et la cognition. L’hypnose L’apport des médecines parallèles constitue une option thérapeutique potentiellement valable comme traitement de recours ou d’appoint du syndrome d’hyperactivité vésicale compte tenu du préjudice fonctionnel de l’HVI et des effets indésirables potentiels des autres traitements. Freeman en 1982(39), en 12 séances pour 50 femmes, a estimé que 29 étaient guéries et 14 améliorées. Il n’y a pas à ce jour de données scientifiques probantes permettant de démontrer l’efficacité de l’hypnose en pratique clinique(41).

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