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Ovaires

Publié le 31 aoû 2006Lecture 12 min

Stimulation ovarienne chez la femme de plus de 38 ans

I. Cedrin-Durnerin, hôpital Jean-Verdier, Bondy
Chez la femme, il existe naturellement un déclin de la fertilité avec l’âge qui devient beaucoup plus marqué vers 38 ans. Ce déclin se traduit par un délai nécessaire pour concevoir beaucoup plus long et d’un risque de fausse couche spontanée (FCS) plus élevé.
  Les femmes de plus de 38 ans présentent une diminution de leur fertilité liée à une diminution du stock des follicules ovariens. Bien que leurs cycles restent réguliers et ovulatoires, la montée de FSH en phase lutéale débute plus précocement et est responsable d’une avance de maturation folliculaire qui se traduit par une phase folliculaire courte avec une ovulation précoce. Pour stimuler ces patientes, l’utilisation de minidoses d’agonistes de la GnRH pour prévenir la montée de FSH en phase lutéale, suivie de l’administration de doses moyennes de FSH (100 à 112,5 UI/jour) après la survenue des règles, permet de remplir l’objectif d’une stimulation pauci-folliculaire. Ce protocole de stimulation permet d’obtenir des taux de grossesse satisfaisants, mais les patientes doivent être informées que le taux de FCS reste élevé du fait de l’altération de la qualité des ovocytes.   Figure 1. Accélération de la décroissance du stock des follicules (d’après 1).   Aspects physiopathogéniques du vieillissement ovarien Deux mécanismes interviennent dans le déclin de la fertilité. La diminution du stock des follicules Les travaux de Goujon(1) sur des coupes histologiques d’ovaires ont montré qu’il existait une décroissance du stock des follicules tout au long de la vie avec une accélération de cette perte vers 38 ans jusqu’à la ménopause qui survient lorsqu’il ne reste plus que 1 000 follicules (figure 1). En échographie(2), une décroissance similaire du nombre des petits follicules antraux visibles en début de cycle a pu être mis en évidence (figure 2) . Ces travaux ont abouti au concept de l’existence d’une relation entre le nombre de follicules présents dans les ovaires et les stades de la vie de reproduction. La période optimale pour la reproduction correspond à un stock folliculaire > 25 000 follicules. En dessous de ce nombre, les cycles continuent à être réguliers et ovulatoires, mais la fertilité baisse puis les cycles deviennent irréguliers avant la ménopause. La période de temps entre le début des irrégularités menstruelles et la ménopause est relativement fixe, d’environ 6 ans. On peut, de la même façon, penser que l’intervalle entre le début du déclin de la fertilité et la ménopause est fixe. Comme cet intervalle est estimé à 13 ans et qu’environ 10 % de la population est ménopausée à l’âge de 45 ans, on peut en déduire que 10 % des femmes présentent un déclin de la fertilité dès l’âge de 32 ans. Ceci aboutit à un nouveau concept de « vieillissement ovarien prématuré ». Il s’agit donc de femmes jeunes avec des cycles réguliers ovulatoires, mais dont la fertilité est celle de femmes de plus de 38 ans.   Figure 2. Diminution du nombre des follicules antraux (d’après 2).   L’altération de la qualité ovocytaire Le vieillissement ovarien affecte non seulement le follicule, mais également l’ovocyte et on a pu montrer après 38 ans, une augmentation du taux d’aneuploïdie des ovocytes et des embryons, liée à des altérations de la formation du fuseau et de l’alignement des chromosomes. Ces anomalies expliquent le risque accru de FCS.   Aspects cliniques du vieillissement ovarien L’accélération de la perte du stock des follicules et l’altération de la qualité des ovocytes ont lieu, alors que des cycles réguliers, ovulatoires persistent avec des sécrétions de stéroïdes préservées. Néanmoins, il est possible de dépister ces patientes par une échographie ovarienne qui montre un nombre réduit de follicules antraux. Il existe également des signes biologiques de diminution de la réserve avec des perturbations variables des trois marqueurs : FSH, E2 et inhibine B. On peut retrouver, de façon associée ou dissociée, une augmentation de la FSH, une augmentation de l’E2 ou une diminution de l’inhibine B à J3. Il existe également un signe d’appel clinique très simple qui est la diminution de la longueur des cycles qui deviennent inférieurs à 26 jours. L’apparition du raccourcissement des cycles est synchrone de la diminution du stock des follicules ovariens. Ce raccourcissement affecte principalement la longueur de la phase folliculaire qui passe de 16 ± 4 jours à 18-30 ans à 10 ± 2 jours à 40 ans sans modification de la longueur de la phase lutéale.   La longueur des cycles devient inférieure à 26 jours.   Caractéristiques des phases folliculaires courtes Deux hypothèses ont été envisagées pour expliquer ces phases folliculaires courtes. Hypothèse d’accélération de la maturation folliculaire Le recrutement folliculaire est initié en fin de phase lutéale avec une chronologie normale par rapport à un cycle de longueur normale, mais du fait de la diminution du stock des follicules et de la baisse de l’inhibine B, une augmentation plus rapide et plus forte de la FSH entraîne une croissance folliculaire accélérée. L’étude de Klein en 96(3) n’a pu confirmer cette hypothèse. En comparant des femmes de 20-25 ans à des femmes de 40-45 ans, elle a montré que la diminution d’environ 3 jours de la durée de la phase folliculaire était liée à une augmentation plus précoce de la FSH en fin de phase lutéale sans accélération de la croissance folliculaire qui était identique dans les deux groupes. Hypothèse d’avance de maturation folliculaire La croissance folliculaire démarre plus précocement en fin de phase lutéale, mais a une durée totale équivalente à celle d’un cycle normal (figure 3). Cette hypothèse a été démontrée par l’étude de Van Zonnenveld(4) comparant des femmes de 22 à 34 ans à des femmes de 41 à 46 ans. Il retrouve une diminution de la phase folliculaire de 3 jours, avec une augmentation plus précoce de la FSH qui est significativement différente en fin de phase lutéale dès le 11e jour après le décalage thermique chez les femmes de plus de 40 ans, comparativement aux femmes jeunes. En revanche, la durée du cycle entre la montée de FSH et le pic ovulatoire est identique dans les deux groupes. Cependant, du fait du démarrage plus précoce de la croissance folliculaire en fin de phase lutéale, l’apparition du follicule sélectionné de 10 mm de diamètre survient plus tôt, vers le 7e ou 8e jour du cycle chez les femmes de plus de 40 ans, contre le 10e ou 11e jour du cycle chez les femmes plus jeunes. Cette montée plus précoce de la FSH peut être liée à la fois à la baisse de la sécrétion d’estradiol et d’inhibine A par le corps jaune du cycle précédent, et à une sécrétion moindre de l’inhibine B du fait d’un nombre de follicules antraux plus faibles chez les femmes plus âgées.   Figure 3. Avance de maturation folliculaire.   Cette augmentation plus précoce et plus importante de la FSH aurait un rôle compensateur de la baisse de la fertilité et serait un moyen de maintenir des cycles ovulatoires, malgré la baisse du stock des follicules. Il a en effet été constaté un pic de grossesses gémellaires spontanées à cet âge, correspondant à une ovulation plus fréquente de plusieurs follicules. En plus de la diminution du stock des follicules et de l’altération de la qualité ovocytaire, le raccourcissement du délai entre la fin des règles et le moment de l’ovulation peut être responsable d’une altération de l’endomètre et du mucus cervical qui peut participer à la baisse de la fertilité liée à ces phases folliculaires courtes.   Aspects pratiques de l’induction d’ovulation en cas de phase folliculaire courte L’induction d’ovulation chez les patientes présentant une phase folliculaire courte n’est pas aisée, car en démarrant l’apport de FSH au 5e/6e jour du cycle, on intervient sur un follicule qui est déjà sélectionné et l’apport de FSH exogène accélère encore la maturation folliculaire aboutissant à une ovulation encore plus précoce d’un seul follicule. Nous avons donc émis l’hypothèse qu’en bloquant la montée de FSH par l’utilisation d’un agoniste de la GnRH en phase lutéale, puis en contrôlant la croissance folliculaire par l’apport de doses moyennes de FSH après la survenue des règles, on pourrait rallonger la phase folliculaire et améliorer les chances de grossesse. Une étude prospective a donc été réalisée pour vérifier cette hypothèse.   Le protocole Soixante-neuf patientes présentant une phase folliculaire < 12 jours, authentifiée par une échographie aux 9e et 10e jours du cycle, une courbe thermique et un dosage de progestérone en phase lutéale ont été incluses dans cette étude. Le protocole consistait en l’administration de triptoréline 0,025 µg/jour à partir du 18e/19e jours du cycle jusqu’aux règles. À partir du 2e jour des règles, tout en poursuivant l’agoniste à la même dose, la stimulation était débutée par l’administration de 75 à 150 UI/jour de FSH jusqu’à l’obtention de 1 à 4 follicules matures. L’ovulation était alors déclenchée par hCG 5 000 UI et la phase lutéale soutenue par 2 injections de 2 500 UI d’hCG.   Les patientes L’âge moyen des patientes incluses dans cette étude était de 35 ± 5 ans avec des extrêmes allant de 23 à 43 ans. La durée de la phase folliculaire était de 9,6 ± 1 jour (6 à 12 jours). 80 % des patientes présentaient une FSH > 10 UI /l ou un E2 > 60 pg/ml à J3 du cycle.   Les résultats En comparant le 1er cycle de traitement au cycle témoin spontané, la stimulation par agoniste du GnRH et FSH a permis : – de rallonger la durée de la phase folliculaire de 3 jours ; – d’augmenter le nombre de follicules préovulatoires et l’épaisseur de l’endomètre au moment de l’ovulation (tableau 1). Sur les 69 premiers cycles de traitement, 13 grossesses ont été obtenues (18,8 %/cycle), mais avec un taux de fausses couches élevé (52 %).     Le tableau 2 rapporte les résultats des 179 cycles réalisés. Après le début de l’agoniste au 19e jour du cycle, les règles surviennent avec un retard d’environ 5 jours, lié au soutien du corps jaune par le flare-up initial de FSH et de LH induit par l’agoniste. Les doses de FSH utilisées restent modérées. Seuls 5 cycles ont été annulés, 2 pour non-réponse et 3 pour réponse multifolliculaire avec >= 5 follicules.     En moyenne, 2 follicules de plus de 17 mm de diamètre étaient présents au moment du déclenchement. Dans les deux tiers des cycles, une insémination intra-utérine a été réalisée en raison d’un test de Huhner négatif lié à une mauvaise qualité de la glaire cervicale. Le taux de grossesses total pour l’ensemble des cycles est de 15,1 % par cycle avec un taux de FCS qui reste élevé de 44 %. Au total, 20 % des patientes ont accouché grâce à ce protocole.   Au total, 20 % des patientes ont accouché grâce à ce protocole.   Commentaire Le taux de grossesses obtenu est donc identique à celui des grandes séries de stimulation d’ovulation associée à des inséminations intra-utérines dans une population non sélectionnée, mais le taux de FCS est beaucoup plus élevé semblant suggérer que si ce protocole améliore les chances d’implantation, il ne modifie pas la qualité ovocytaire. Ce risque élevé de FCS correspond au vieillissement ovarien de ces patientes, quel que soit leur âge (taux de FCS identique chez les moins de 36 ans et les plus de 36 ans). L’amélioration du taux de grossesses peut être liée à l’allongement de la phase folliculaire et, en particulier, à l’allongement de l’intervalle entre les règles et l’ovulation qui permet une meilleure maturation de l’endomètre. On peut également évoquer un effet de l’agoniste du GnRH qui prévient la lutéinisation prématurée, fréquemment observée chez ces patientes. L’agoniste du GnRH pourrait également avoir un effet direct sur le follicule ou sur l’implantation par le biais des récepteurs à la GnRH qui sont présents dans ces tissus. Enfin, il existe également un rôle certain de la stimulation par FSH puisque les taux de grossesse sont dépendants du nombre de follicules préovulatoires : 7,6 % (6/79) avec 1 follicule, 15,6 % (10/64) avec 2 follicules et 29,6 % (8/28) avec 3 ou 4 follicules. Le taux de grossesses gémellaires augmente également avec le nombre de follicules (0, 20 et 25 %), mais compte tenu du taux élevé de FCS, on peut sûrement se permettre, chez ces patientes, de déclencher l’ovulation avec 3 ou 4 follicules, une partie de ces grossesses gémellaires se réduisant spontanément en grossesse simple. En pratique  Devant une patiente qui se présente avec des cycles courts <= 26 jours, il faut, dans un premier temps, vérifier par une échographie au 9-10e jour et un dosage de progestérone au 18e jour, qu’il s’agit de cycles ovulatoires avec une phase folliculaire courte. Cela orientera vers un vieillissement ovarien physiologique si la femme a plus de 38 ans, ou prématuré si la femme est plus jeune, qui sera confirmé par le bilan hormonal à J3 et par le compte des follicules antraux.  Pour stimuler ces patientes, une désensibilisation par de faibles doses d’agonistes de la GnRH démarrée en milieu de phase lutéale associée à des doses moyennes de FSH 100 à 112,5 UI/ jour après la survenue des règles permet de remplir l’objectif d’une stimulation pauci-folliculaire (2 à 4 follicules).  Il est souhaitable d’y associer une insémination intra-utérine en raison de la qualité médiocre de la glaire chez ces patientes, et un soutien lutéal pour contrecarrer la baisse des gonadotrophines et en particulier de la LH qui survient à l’arrêt de l’agoniste.  Ce type de stimulation permet d’obtenir des taux de grossesses satisfaisants, mais les patientes doivent être informées que le taux de FCS reste élevé.      

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