publicité
Facebook Facebook Facebook Partager

Cancérologie

Publié le 06 mai 2010Lecture 8 min

Cancer du col utérin : pronostic et suivi en 2010

V. LAVOUÉ*, F. FOUCHER*,**, J. LEVÊQUE*,** *Service de gynécologie CHU Anne de Bretagne, Rennes **Département d’oncologie chirurgicale, CRLCC Eugène Marquis, Rennes

Le suivi des cancers invasifs du col utérin doit être adapté à la gravité appréciée sur les facteurs pronostiques préthérapeutiques et sur le résidu tumoral post-thérapeutique, et modulé selon le temps passé depuis le traitement : le risque de rechute est maximal les 3 premières années durant lesquelles la surveillance doit être bi- ou triannuelle ; il se stabilise en plateau après 5 ans, date butoir à partir de laquelle un suivi annuel reste nécessaire, notamment en raison du risque d’apparition d’autres lésions HPV induites. La place de la clinique (recueil des plaintes, examen et frottis) reste prépondérante, permettant de choisir les examens complémentaires les plus adaptés.

Le suivi du cancer du col utérin (CCU) est déterminé par son pronostic qui va influer sur périodicité et ses modalités. Le CCU est un cancer rare (3 068 nouveaux cas et 1 067 décès en 2005) de la femme jeune, dont le pic d’incidence se situe à 41 ans. Le suivi est particulièrement « serré » les 5 premières années : – cancérologique (l’analyse d’une cohorte de 2 932 patientes traitées en France d’un CCU entre 1989 et 1993 révèle que les rechutes sont préférentiellement observées avant 5 ans ; la survie sans récidive à 1 an est de 89 %, à 3 ans de 75 % et à 5 ans de 70 % pour rester en plateau ensuite (1)) ; – médical, à la recherche des complications et séquelles liées aux traitements ; – enfin, virologique prolongé, le CCU étant lié aux papillomavirus humains à haut risque, dont on connaît l’ubiquité.   Qui suivre ? Un suivi cancérologique personnalisé Les risques de récidive dépendent de nombreux facteurs intrinsèques et extrinsèques, pré- et postopératoires. Le stade FIGO de la lésion où figure en bonne place la taille tumorale (avec un seuil pronostique fixé à 4 cm), l’atteinte ganglionnaire dont le poids pronostique dépend du nombre et du siège (bilatéral pelvien, lombo-aortique) des ganglions métastatiques avec une diminution de 30 % en moyenne de la survie globale en cas de positivité (tableau 1), le grade et le type histologiques (avec par exemple le bon pronostic des adénocarcinomes à stade égal, et la gravité des carcinomes à cellules claires), le jeune âge lorsqu’il est associé aux tumeurs histologiquement agressives, sont les principaux facteurs préthérapeutiques retenus (2). Le résidu tumoral post-thérapeutique est certainement un facteur majeur indépendant (3) qui pose le problème non encore résolu de l’intérêt de la chirurgie adjuvante dont la morbidité est élevée après radio-chimiothérapie concomitante : l’essai du Gynecologic Oncologic Group (portant sur la place de l’hystérectomie adjuvante après radiothérapie seule) n’a pas mis en évidence de bénéfice sur la survie globale de la chirurgie de clôture, hormis pour les tumeurs les plus volumineuses, mais il a montré un meilleur contrôle local (récidives à 5 ans de 14 % vs 27 %) (4). Les patientes à risque maximal de rechute précoce sont celles qui cumulent les facteurs de mauvais pronostic préthérapeutique et présentant une mauvaise réponse à la radio-chimiothérapie concomitante.   Les récidives et les complications thérapeutiques Les récidives des CCU traitées Elles sont de mauvais pronostic, en particulier lorsqu’elles sont précoces et latéro-pelviennes ; le bénéfice de leur diagnostic précoce reste discuté (5). Ces récidives sont symptomatiques dans 84 % des cas, mais les signes cliniques restent peu spécifiques : chez 4 023 patientes ayant présenté 457 récidives, Kew et coll. notent (6) : – des récidives locales dans 60 % des cas, marquées par des douleurs, une symptomatologie urinaire ou digestive d’interprétation délicate chez des patientes opérées et radiothérapées ; – des récidives ganglionnaires dans 15 % des cas (figure 1) révélées parfois par des syndromes de compression veineuse (oedèmes veineux, complications thromboemboliques) ; – des récidives systémiques dans 25 % des cas dont les manifestations varient selon l’organe atteint et la dégradation de l’état général.   Figure 1. Métastase ganglionnaire iliaque droite responsable d’une compression veineuse. Une éducation des patientes, en les alertant sur l’apparition d’une symptomatologie nouvelle ou se modifiant, est donc nécessaire. Le deuxième point est la surveillance prolongée des autres sites HPV-sensibles : une augmentation du risque relatif de cancer du vagin (RR = 682 ; IC95 % : 5,61-8,21) ou vulvaires chez les patientes traitées d’une pathologie cervicale est observée jusqu’à plus de 25 ans (7). La recherche et la prise en charge des complications thérapeutiques sont deux des objectifs du suivi ● Les complications radiques graves intéressent principalement le tube digestif : les entérites radiques avec leur cortège de diarrhée chronique et malabsorption, les sténoses iléales ou sigmoïdiennes qui relèvent de la mise en place d’endoprothèses ou de résections segmentaires toujours périlleuses. Leur diagnostic est assuré par les explorations radiologiques (opacifications, scanner) et endoscopiques ; leur prise en charge relève d’équipes spécialisées multidisciplinaires comprenant des nutritionnistes, gastroentérologues et chirurgiens. ● On peut en rapprocher les fistules (urogénitales, entérales ou sigmoïdiennes) qui surviennent parfois très à distance du traitement initial : elles imposent une preuve histologique car elles sont aussi le témoin d’une reprise évolutive de la maladie. ● Les séquelles fonctionnelles affectent les émonctoires (constipation terminale segmentaire, atonie vésicale), en particulier après chirurgie très élargie ayant lésé l’innervation de ces organes, et le confort pelvien ; à ce titre, la littérature est pauvre sur l’utilisation des traitements hormonaux substitutifs reposant sur des avis d’experts autorisant la prescription d’estrogènes seuls en cas de carcinome épidermoïde et d’estroprogestatifs en cas d’adénocarcinome en raison de l’existence dans ce sous-type de récepteurs estrogéniques ; la prescription d’androgènes n’est pas documentée. L’utilisation de lubrifiants chez les deux partenaires doit être encouragée en cas de sécheresse vaginale. ● La sexualité doit être abordée avec le couple (figure 2) : de nombreux blocages existent tant physiques, imposant une réappropriation du corps transformé par les traitements, que psychiques essentiellement basés sur la peur (peur de la douleur, de la contamination) touchant la patiente elle-même, mais aussi son partenaire.   Figure 2. La patiente, son partenaire, le médecin autour de la question trop souvent taboue de la sexualité après le cancer Les difficultés rencontrées par les patientes sont naturellement corrélées aux traitements, mais aussi au contexte socio-économique et culturel(8). Les objectifs de la surveillance sont de dépister les récidives sans que le bénéfice d’un diagnostic précoce soit établi, de reconnaître et traiter les complications post-thérapeutiques et d’améliorer la qualité de vie de la patiente, en particulier dans le domaine de la sexualité et de l’équilibre hormonal.   Quel suivi ? Les modalités cliniques du suivi ont été appréciées par un travail portant sur une cohorte de 203 patientes traitées aux stades IB-IIA, suivies plus de 2 ans et ayant présenté 31 récidives.   Le suivi fait la part belle à la clinique ● À l’heure des examens complémentaires sophistiqués, la clinique conserve toute sa pertinence : interrogatoire, examen et réalisation des frottis (tableau 2) qui augmente significativement la valeur prédictive de la clinique (9).   Le dosage des marqueurs ● Le dosage des marqueurs (SCC dans les lésions épidermoïdes et CA 125 dans les lésions glandulaires) doit être répété annuellement après le traitement dès lors que les taux préthérapeutiques étaient élevés : leur élévation est assez sensible (respectivement 60 à 70 % et 30 à 40 %) et précède de 7 mois en moyenne les manifestations cliniques (10). Les examens radiologiques Principalement l’IRM et l’échographie qui permettent d’évaluer l’extension de la récidive et, par là même, sa résécabilité et la réalisation de biopsies guidées pour une certitude histologique (11).   L’intérêt du PetScan Il est double : permettre le diagnostic de la récidive précocement avant les signes cliniques et s’assurer de l’absence de localisations extrapelviennes concomitantes. Une étude pilote récente met en évidence un bénéfice en termes de survie globale lors de la comparaison de patientes chez qui la récidive a été diagnostiquée par PetScan vs devant des manifestations cliniques (5). ● Un cas particulier est représenté par le suivi des patientes traitées par trachélectomie élargie et lymphadénectomie coelioscopique (12) : – les taux de récidives (2 à 4 %) sont identiques à ceux des patientes traitées radicalement ; – les grossesses obtenues (300 après 900 trachélectomies élargies dans une compilation récente des séries publiées) sont à haut risque : seulement 196 enfants sont nés vivants avec une prématurité < 32 SA dans 10 % des cas ; – le suivi de ces patientes n’est pas encore fixé : les frottis AGC (atypies de cellules glandulaires) sont sur-représentés, imposant une comparaison avec le frottis préthérapeutique pour trancher ; la colposcopie est difficile en raison des nouvelles conditions anatomiques ; les tests HPV, qui pourraient trouver là une excellente indication à l’instar du suivi post-conisation, n’ont pas encore été évalués. Le suivi s’appuie sur la clinique (interrogatoire orienté, examen, frottis) et le dosage des marqueurs (SCC et CA 125) s’ils étaient élevés en préthérapeutique, qui guident le choix des examens radiologiques utiles.

Attention, pour des raisons réglementaires ce site est réservé aux professionnels de santé.

pour voir la suite, inscrivez-vous gratuitement.

Si vous êtes déjà inscrit,
connectez vous :

Si vous n'êtes pas encore inscrit au site,
inscrivez-vous gratuitement :

Version PDF

Articles sur le même thème

Vidéo sur le même thème