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Ménopause

Publié le 28 avr 2023Lecture 7 min

Consultation de la cinquantaine : prévention et prescription du THM

Caroline GUIGNOT, Lille

La consultation de la cinquantaine vise à informer, à améliorer la qualité de vie et à prévenir les maladies chroniques des femmes. Elle est aussi le moment pour discuter du THM, parfois décrié et souvent craint malgré ses bénéfices.

A la cinquantaine, une nouvelle période de vie s’ouvre pour les femmes. La consultation qui en découle doit permettre de dresser un bilan clinique, que la femme soit en périménopause ou en ménopause. L’hypoestrogénie rencontrée alors modifie le profil lipidique (augmentation du LDL-C et des TG, diminution du HDL-C), augmente la rigidité artérielle et la prévalence de l’HTA, accroît l’insulinorésistance et la prévalence du diabète, du syndrome métabolique, de la dysfonction endothéliale et l’activation de la coagulation. La prévention des maladies chroniques est donc importante. La consultation doit comporter la mesure de la taille et un bilan des facteurs de risque d’ostéoporose afin de prescrire une densitométrie minérale osseuse le cas échéant. Elle doit aussi comprendre un bilan cardiovasculaire avec mesure de la tension artérielle, prescription d’un bilan métabolique, recherche du tabagisme et des antécédents familiaux précoces. Les risques individuels des différents cancers gynécologiques sont également passés en revue. Les questions relatives à l’hygiène de vie doivent également être évoquées : l’équilibre alimentaire et l’activité physique sont déterminants pour la santé cardiovasculaire et osseuse, mais aussi pour la prévention du cancer du sein, ce que les femmes ignorent souvent. Si la consultation des femmes à cet âge concerne surtout des plaintes relatives aux premiers signes climatériques – bouffées de chaleur, troubles du sommeil, stress, irritabilité, troubles de l’humeur favorisant le grignotage et la prise de poids, etc. –, la consultation doit comporter une discussion plus large sur la ménopause, les bouleversements qu’elle peut induire et les solutions thérapeutiques qui y répondent. Les bouffées vasomotrices, qui sont à la fois un marqueur et un facteur de risque psychologique (dépression), cardiovasculaire et neurocognitif, sont évoquées le plus souvent. Le syndrome génito-urinaire, avec atrophie et sècheresse vaginale et modifications de la statique pelvienne, ne doit cependant pas être négligé. Souvent, les femmes taisent ou considèrent comme une fatalité les troubles urinaires et la perturbation de la sexualité qui y sont associés et qui se surajoutent à la baisse de la libido d’origine biologique et aux paramètres socioculturels et interpersonnels. Bien souvent, elles ignorent que ces troubles peuvent être pris en charge.   Quels bénéfices attendre du THM ? La carence estrogénique de la ménopause est un déterminant majeur de l’ostéoporose postménopausique et du risque de fracture. Le risque cumul. De fracture est de 40 % dans la ménopause contre 9 % dans le cancer du sein. Le dépistage des femmes à risque repose avant tout sur la mesure de la densité minérale osseuse (DMO) par absorptiométrie biphotonique à rayons X. La valeur prédictive de la DMO est d’autant plus fiable qu’elle est mesurée en début de ménopause. Schématiquement, le THM est recommandé en première intention dès le début de la ménopause, en prévention de l’ostéoporose chez les femmes à risque de fracture (T-score vertébral ou fémoral < -2). La décision doit évidemment être prise en fonction des autres facteurs de risque osseux et de la balance bénéfice-risque du traitement. La plupart du temps, les faibles doses d’estrogènes sont efficaces, même s’il existe une forte variabilité interindividuelle. Lorsque la balance bénéfice-risque globale du THM ne permet pas de maintenir le traitement, malgré un bénéfice osseux attendu, d’autres médicaments peuvent heureusement le relayer : le raloxifène (qui a aussi l’avantage de prévenir le risque de cancer du sein) ou, chez les femmes les plus âgées, les bisphosphonates ou le dénosumab. Par ailleurs, le THM a aujourd’hui un bénéfice démonté ou probable sur les symptômes climatériques, les troubles de l’humeur, la mémoire, le déclin cognitif, la prévention du diabète de type 2 et du cancer colorectal. Concernant l’athérome, le THM aurait un effet préventif lorsque les plaques ne sont pas encore installées, mais dans le cas contraire il les déstabiliserait, renforçant la notion de fenêtre d’intervention favorable en début de ménopause.   Que faut-il craindre ? Les femmes expriment deux inquiètudes principales face à la ménopause et au THM. Tout d’abord, elles pensent souvent qu’ils favorisent la prise de poids alors que les données suggèrent uniquement une redistribution des graisses avec augmentation de l’obésité abdominale liée à la ménopause et aucun impact significatif du THM sur le poids. La seconde inquiétude concerne le risque de cancer du sein alors que les risques ostéoporotiques et cardiovasculaires lui sont supérieurs. Concernant ce risque carcinologique précis, on sait désormais qu’il dépend de la nature des molécules utilisées, sans influence de la voie d’administration : les données de l’étude française E3N ont prouvé que les estroprogestatifs (estradiol, progestérone micronisée ou dihydrogestérone) prescrits durant moins de 5 ans n’augmentent pas le risque de cancer du sein. Ce risque est en revanche accru pour les associations basées sur d’autres progestatifs, y compris avant 5 ans de traitement. L’utilisation préférentielle de l’association entre estradiol cutané et progestérone micronisée ou dydrogestérone qui est faite en France n’est pas associée à un surrisque dans les études d’observation conduite sur près de 7 ans. Par ailleurs, le risque de cancer de l’ovaire peut être accru pour certains types histologiques. Et celui de cancer de l’endomètre peut être augmenté sous THM séquentiel, lorsque la durée du progestatif est inférieure à 12 jours. Ces données suggèrent une information suffisante des femmes, et une discussion permettant de mettre en balance ces risques par rapport au bénéfice qui peut être apporté. Il faut enfin noter que le risque d’évènements thromboembolique veineux est accru pour les voies d’administration orales.   Comment prescrire ? Dans ces conditions, la prescription d’un THM doit être discutée avec les femmes : elle est individualisée selon les symptômes climatériques et selon les risques et avantages attendus du traitement. Lorsque la balance bénéfice-risque le justifie, la prescription repose en première intention sur le 17 béta-estradiol ou le valérate d’estradiol, associés à la progestérone micronisée ou à la dydrogestérone, en schéma combiné continu. Les estrogènes sont prescrits par voie topique pour prévenir le risque thromboembolique lié à la voie orale. Par extension, la prescription est possible chez une femme en périménopause qui n’aurait pas encore atteint les 12 mois d’aménorrhée, si elle présente déjà des symptômes climatériques génant la qualité de vie, à condition que le bilan clinique et biologique soit favorable. Le test à la progestérone n’est pas nécessaire en amont, sauf si des glaires cervicales traduisant une estrogénie significative sont repérées lors de l’examen gynécologique. Le schéma combiné continu permet de ne pas avoir d’hémorragie de privation. A la mise en place du traitement, les femmes doivent être informées du phénomène de résurgence folliculaire qui peut favoriser la survenue de règles voire d’ovulation. Il est donc préférable d’interrompre le traitement en cas de mastodynie. La fenêtre d’opportunité de cette prescription est de 10 ans, mais il est recommandé que le THM soit commencé aussi précocement que possible dès l’instauration de la ménopause, car il permet d’améliorer le pronostic osseux. Une prescription tardive ne permet pas de récupérer l’éventuelle perte osseuse ayant eu lieu dès le début de l’hypoestrogénie. La durée de prescription est souvent de 5 ans, et si le bénéfice-risque – réévalué annuellement – reste favorable, elle peut être maintenue jusqu’à l’âge de 60 ans. Au-delà, la prescription s’évalue au cas par cas. à noter que les bouffées vasomotrices peuvent aussi être prises en charge par des traitements non hormonaux (recommandations 2021 spécifiques du CNGOF et du GEMVi).   Attention aux fausses contre-indications Un THM est envisageable chez les femmes ayant des antécédents d’endométriose, préférentiellement par progestérone seule ; il existe toutefois un risque de réactivation des lésions chez celles qui ont conservé leur utérus et qui ont des lésions persistantes de plus de 3 cm. Il n’est pas recommandé de prescrire un THM (voie orale ou transdermique) chez une femme hypertendue, à risque cardiovasculaire élevé ou très élevé, quels que soient son âge et l’ancienneté de sa ménopause. L’absence de contrôle tensionnel et un niveau de risque cardiovasculaire élevé à très élevé invitent à la plus grande prudence. Le bénéfice-risque du traitement doit être précautionneusement évalué chez celles ayant eu des antécédents d’HTA durant la grossesse, un diabète gestationnel, et celles qui ont une migraine avec aura, une maladie systémique auto-immune ou une maladie inflammatoire chronique. Sur le plan thromboembolique, le THM est contre-indiqué En cas d’antécédents d’évènement, d’évènement en cours ou si l’état thrombotique de la patiente est défavorable. Cependant, la voie cutanée peut être proposée en alternative, si aucun autre facteur de risque ne le contre-indique. Sur le plan du risque carcinologique, le THM est contre-indiqué en cas de haut risque mammaire (antécédents personnels de cancer du sein, mastopathies prolifératives avec atypies), et la plus grande prudence s’impose chez celles ayant des antécédents familiaux sans qu’une prédisposition génétique n’ait été identifiée. Cependant, les femmes présentant une mutées BRCA 1 ou 2 et ayant bénéficié d’une annexectomie prophylactique peuvent être traitées par THM transdermique.

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