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Nutrition

Publié le 01 nov 2016Lecture 5 min

Conséquences fœtales de l'obésité maternelle

L.-D. VAN EGROO, Saint-Cloud

Du désir de grossesse aux deux premières années de vie, ce sont 1 000 jours de fenêtres d’opportunité, mais aussi de vulnérabilité, à ne pas manquer pour la santé de l’adulte de demain et par exemple prévenir les conséquences d’une obésité maternelle. Une meilleure sensibilisation du public, la mise en place d’une prévention adaptée et une prise en charge pluridisciplinaire sont nécessaires avec la participation de l’ensemble des acteurs de santé.

Durant cette période des 1 000 jours, l’environnement, au sens large du terme, joue un rôle important pour la santé à venir ; l’épidémie d’obésité constitue un exemple d’environnement délétère. De très nombreuses publications apportent un éclairage nouveau sur ce qui doit être un enjeu de santé publique. Les professionnels de santé mais aussi les pouvoirs publics et l’ensemble des acteurs de la santé doivent se mobiliser car la prise de conscience est encore insuffisante au niveau de la population. Il ne s’agit pas de surmédicaliser la grossesse, mais bien de mener des actions d’information, de prévention, d’adapter l’offre de soins, ceci sans stress supplémentaire, mais en agissant aussitôt que possible, sachant qu’il n’est jamais trop tard pour agir : dès la conception et même dès le désir de grossesse, il faut prendre en charge l’obésité ! Passé 35 ans, modifier l’IMC est moins efficace sur la survenue d’une grossesse ! L’obésité chez une femme impacte négativement la capacité à concevoir, le nombre d’enfants, comme l’a montré Jukela aux États-Unis en 2007, et allonge le délai de mise en route d’une grossesse, comme cela a été publié par Wise en 2010. Sneed en 2008 a publié un travail original rétrospectif sur 2 167 femmes. Il a notamment montré que, chez la femme en surcharge pondérale ou obèse, la prise en charge pour réduire l’IMC et son impact sur la survenue d’une grossesse évolue avec l’âge ; ainsi, passé 35 ans, la correction de l’IMC semble moins efficace sur la fertilité. En revanche, agir avant l’âge de 35 ans induit un effet positif. Mieux vaut donc agir tôt que tard. Si l’on observe les adolescents et les adolescentes, respectivement 12 % et 10 % en surcharge pondérale sont nés de mère de poids normal alors que 39 % et 31 % sont nés de mère obèse (d’après Jaaskelainen 2011) (tableau 1) !     In utero, des risques de malformations !   Le surpoids et l’obésité de la future mère lors de la conception augmentent le risque de surpoids à la naissance par 3, de macrosomie par 3,23, et d’obésité chez l’enfant par 3. La prévalence de l’obésité a tendance à se stabiliser mais continue d’augmenter chez les femmes et surtout chez les 18-24 ans (Obépi 2012). Globalement, 10 % des femmes enceintes sont obèses et le risque de malformations pour le foetus est alors significativement augmenté ; le risque de malformation du tube neural, par exemple, est multiplié par 2,4. Rappelons qu’il est recommandé de prescrire non pas 0,4 mg d’acide folique, mais 5 mg chez la femme à risque en désir d’enfant. Au niveau du placenta, un environnement « obésogène » induit des perturbations pouvant entraîner des modifications de stockage et de transport des lipides, favoriser l’insulinorésistance (G. Gascoin JFRN 2014) ; c’est pourquoi le maintien d’une activité physique est recommandé durant la grossesse (P. Rozenberg CNGOF 2014). L’impact de l’obésité ne se limite pas aux risques de malformation, mais elle augmente également la survenue d’une HTA gravidique par 1,44, de césarienne par 1,3, de déclenchement par 1,57… En revanche, dans ce même travail récent, il n’a pas été montré d’augmentation du risque de prééclampsie ni de la demande d’IMG pour malformations (P.-Y. Robillard JFRN 2014). Le risque de mort in utero est multiplié par 2,79 si l’IMC maternel est > 35 kg/m2, d’après la publication de M. Cadegran de 2004. Plus récemment, P.-Y. Robillard a rapporté dans le sud de la Réunion un risque de décès périnatal multiplié par 1,57.   Une naissance plus à risque de complications !   En fonction de l’augmentation de l’IMC maternel, les risques de prématurité, de dystocie des épaules, d’inhalation méconiale, de poids supérieur à 4 500 g augmentent (tableau 2).     Un allaitement plus difficile !   Chez la femme obèse l’allaitement est moins fréquent, moins long ; la qualité du lait de la femme obèse est différente de celle d’une femme présentant un IMC normal avec notamment moins de lipides comme l’a rapporté J.-L. Saben (PloS One, 2014). K.G. Dewey a publié en 2003 le fait que la montée de lait est retardée. R. Hankard a insisté sur le fait que la femme obèse nécessite une attention toute particulière (Pediatrics 2008) ; en effet, sur 111 femmes obèses appariées à des femmes de poids normal, les femmes obèses allaitent moins à la naissance (48 % versus 64 %), le gain de poids de leur nourrisson à 1 mois est inférieur à celui du groupe contrôle, elles arrêtent d’allaiter plus précocement et expriment plus souvent une difficulté sociale à allaiter en public. La femme doit bien vivre les transformations de son corps durant 9 mois, puis la maman doit s’adapter pour retrouver une image corporelle où elle se sente bien.   Des facteurs de risque d’obésité mais un effet négatif peut-être réversible !   S. Robinson en 2014 a évalué 5 facteurs de risque d’obésité pour l’enfant : l’obésité maternelle, la prise de poids durant la grossesse, le tabagisme, la carence en vitamine D durant la grossesse et l’absence d’allaitement au sein. Nous savons également par différents travaux que l’IMC des parents impacte sur l’IMC de l’enfant à l’âge de 7 ans. Des travaux chez l’animal constituent un apport intéressant pour mieux comprendre certains mécanismes ; lors du congrès In Utero de 2013, M. Charlier a présenté les résultats d’une étude comparant un groupe de femelles obèses et un groupe de femelles de poids normal recevant soit un régime adapté soit un régime obésogène durant la gestation, puis l’allaitement et après le sevrage ; ces périodes correspondent en quelque sorte chez l’humain aux 1 000 jours. M. Charlier a montré ainsi qu’un effet réversible est possible, qu’il n’est donc jamais trop tard pour agir et qu’une certaine réversibilité existe en matière d’obésité sur son modèle de souris.   Obésité maternelle et surcoût !   Nous ne pouvons pas faire abstraction de l’évaluation économique. Bjog en 2014 a montré, en comparant des femmes à l’IMC normal à celles ayant un IMC > 25, > 30 et > 40, que le risque d’HTA gravidique passe respectivement pour les trois groupes de 1,76 à 2,98 et 4,48, le diabète gestationnel de 3,89 à 11,9 et 67,4, la césarienne en urgence de 1,94 à 3,41 et 14,34 ; le pourcentage d’hospitalisation augmente de 16 % à 45 % et 88 %, et la durée de séjour en maternité respectivement, toujours en fonction de l’IMC, de 4 % à 9 % et 12 %. Ainsi, le coût de la grossesse et de l’accouchement pour une femme ayant un IMC > 25 est augmenté de 60 £, de 202 £ si IMC > 30 et de 350 £ pour un IMC > 40, ceci toujours en comparaison avec une femme ayant un IMC normal.       Pour en savoir plus • 5e Congres In Utero du 9 octobre 2015 www.in-utero.fr • http://www.perinat-france.org • www.legrandforumdestoutpetits.fr • Obépi 2012.

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