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Chirurgie

Publié le 08 juil 2015Lecture 8 min

Chirurgie de l’endométriose : bilan préopératoire

C. HUCHON*, **, C. MURATORIO**, A. ROSEFORT**, A. DUMONT*, S. ESTRADE-HUCHON***, A. FAUCONNIER** *Centre de recherche du CHU Sainte-Jusine, Montréal, Canada **CHI Poissy-Saint-Germain-en-Laye ; Université Versailles Saint-Quenin ***Insitut hospitalier fr

L’endométriose profonde est de diagnostic difficile en raison de sa symptomatologie hautement disparate. Son bilan préopératoire n’est actuellement pas standardisé et diffère selon les équipes, malgré des recommandations pour la pratique clinique établies par le Collège national des gynécologues et obstétriciens français en 2006.
Cet article traite de l’apport que peuvent présenter le recueil de l’anamnèse, l’examen clinique ainsi que les différents examens complémentaires biologiques et morphologiques, au bilan préopératoire et au diagnostic de l’endométriose profonde.

Anamnèse L’interrogatoire a deux finalités importantes dans le bilan préopératoire de l’endométriose. En premier lieu, évaluer le retentissement de l’endométriose profonde en termes d’altération de la qualité de vie, ce qui pourra guider le clinicien dans sa prise en charge plus ou moins agressive de l’endométriose profonde, lui permettant de proposer l’attitude thérapeutique adaptée avec le meilleur ratio bénéfice/risque pour la patiente. L’autre utilité de l’interrogatoire est son apport au diagnostic positif. Pour évaluer le retentissement de l’endométriose sur la qualité de vie, les marqueurs de sévérité peuvent s’appuyer sur les échelles d’autoévaluation de l’intensité douloureuse des dysménorrhées que sont : – l’échelle visuelle analogique ; – l’échelle numérique simple ; – ou encore l’échelle verbale simple. L’interrogatoire pourra aussi rechercher le retentissement des dysménorrhées sur l’activité quotidienne et professionnelle des patientes ou bien encore la consommation d’antalgiques. Il existe de nombreuses échelles multidimensionnelles de qualité de vie fondées sur des questionnaires généralistes (MOSSF36, EuroQOL, EQ5D, etc.), mais peu adaptés à l’endométriose profonde. Le premier questionnaire de qualité de vie est le EHP-30 (Endometriosis Health Profil-30), secondairement transformé en version plus courte (EHP-5). La problématique de ce questionnaire était qu’il était en langue anglaise et potentiellement non adaptable aux patientes françaises. Pour y remédier, Renouvel et coll. l’ont adapté selon une méthodologie adaptée en langue française. Cet EHP-5 en français est constitué de 11 questions cotées de 0 à 4 points, donnant un total sur 44 points (44/44 étant la plus mauvaise qualité de vie, et 0/44 la meilleure). L’interrogatoire peut aussi être utile au diagnostic positif d’endométriose profonde. Le caractère des dysménorrhées – augmentant continuellement avec les règles – peut aider au diagnostic positif, tout comme la topographie des douleurs. Une dyspareunie profonde évoquera une atteinte des ligaments utérosacrés par l’endométriose, une douleur à la défécation, une atteinte vaginale, alors que des algies pelviennes non cycliques avec des signes digestifs ou des rectorragies évoqueront une atteinte digestive. Enfin, des signes fonctionnels urinaires ou encore une hématurie macroscopique cataméniale seront évocateurs d’atteinte vésicale.   Examen clinique Comme le précisent les recommandations pour la pratique clinique (RPC) du Collège national des gynécologues et obstétriciens français(CNGOF) en 2006, l’examen clinique présente un intérêt pour le diagnostic des lésions profondes d’endométriose, même s’il peut être strictement normal. L’examen au spéculum doit s’attacher à rechercher un nodule bleuté signant une lésion vaginale profonde. Cette recherche doit être particulièrement attentive au niveau de l’aire rétrocervicale. Le toucher vaginal peut retrouver aussi une douleur, voire un nodule à la palpation des ligaments utéro-sacrés. L’examen clinique sera réalisé au mieux pendant les menstruations.   Examens biologiques Les études s’étant intéressées à la pertinence de marqueurs biologiques représentent plus de 1 000 références dans la base de données Medline. Une infinité de marqueurs, plus ou moins exotiques, ont été testés (IL-10, 19, 20, 22, 33, CAs, etc.) sans qu’aucun n’ait démontré son intérêt en routine clinique. Le marqueur le plus fréquemment étudié est le CA 125, qui peut être élevé dans l’endométriose. Cependant, son dosage plasmatique à visée diagnostique et pronostique n’a pas été recommandé par les RPC du CNGOF, cela avec un fort niveau de preuve.   Examens morphologiques   Échographie Comme le suggèrent les RPC, l’échographie doit être réalisée par voie endovaginale et par des opérateurs entraînés. Les signes échographiques d’endométriose sous-péritonéale profonde classiquement décrits sont : un épaississement linéaire hypoéchogène anormal ou encore une image de nodule ou de masse aux contours réguliers ou irréguliers. Une infiltration vaginale peut être évoquée en présence d’un épaississement du cul-de-sac vaginal postérieur avec des zones kystiques rondes anéchogènes. Une atteinte de la cloison recto-vaginale pourra faire visualiser à l’échographie un nodule ou une masse sous le plan horizontal passant par le bord inférieur de la lèvre postérieure du col. Enfin, un ligament utéro-sacré anormal sera visible sous la forme d’un épaississement hypoéchogène ou lorsqu’il présente un nodule. De même, une lésion digestive pourra faire visualiser une masse irrégulière hypoéchogène remplaçant l’aspect linéaire hypoéchogène normal de la musculeuse. Comme le montre une revue de la littérature présentée dans le tableau 1, la sensibilité de l’échographie pour le diagnostic de lésion d’endométriose profonde est disparate, avec des valeurs s’échelonnant de 44 à 88 %. Les sensibilités observées vont de 4 à 81 % pour diagnostiquer l’atteinte des ligaments utéro-sacrés, de 20 à 63 % pour les atteintes vaginales et, enfin, de 33 à 98 % pour les atteintes digestives.     Imagerie par résonance magnétique Les séquences d’imagerie par résonance magnétique (IRM) pondérées en T1 permettent l’analyse anatomique du pelvis. Sur ces séquences, il faut rechercher un hypersignal dû à la présence de dérivés de l’hémoglobine. Une séquence T1 avec suppression de graisse permet la différenciation des éléments hémorragiques des éléments graisseux. En séquence T2, les lésions profondes d’endométriose sous-péritonéale se présenteront sous la forme d’un hyposignal. Un ligament utéro-sacré anormal sera épaissi sous la forme d’un nodule ou d’une masse linéaire aux limites irrégulières. Une endométriose digestive pourra apparaître sous forme d’épaississements pariétaux plus ou moins accompagnés d’hypersignaux. Le tableau 2 présente une revue de la littérature de différentes études s’étant intéressées aux valeurs diagnostiques de l’IRM pour l’identification de lésions d’endométriose sous-péritonéale profondes. Cette revue montre des valeurs reproductibles de sensibilité pour le diagnostic positif d’endométriose profonde, quelle que soit sa localisation, une seule étude retrouvant une sensibilité inférieure à 75 %. La spécificité de l’IRM semble aussi intéressante puisque seule une étude retrouve une spécificité inférieure à 80 %.     Échoendoscopie rectale Elle est considérée par certains auteurs comme l’examen de référence pour le bilan de l’infiltration rectale des lésions d’endométriose pelvienne profonde postérieure. Elle permet de visualiser une interruption de l’hyposignal de la musculeuse en cas d’infiltration rectale. Sa sensibilité pour le diagnostic positif de lésion endométriosique des ligaments utéro-sacrés est médiocre, échelonnée de 37 à 80 % selon les études, tout comme pour l’atteinte du vagin avec des résultats disparates de 7 à 100 %. Sa valeur pour le diagnostic positif d’atteinte rectale est, en revanche, excellente, avec une sensibilité et une spécificité de 90 à 100 % dans 11 séries colligeant au total plus de 500 patientes. L’échoendoscopie rectale est à ce titre recommandée par les RPC dans le cas de nodules d’endométriose sous-péritonéale profonde du septum rectovaginal pour évaluer leur infiltration de la musculeuse rectale en préopératoire. Autres En fonction de la symptomatologie initiale et des localisations variées d’endométriose profonde, d’autres examens peuvent être réalisés. Il s’agit, principalement en cas d’implication des voies urinaires : d’urographie intraveineuse, d’uroscanner, de scintigraphie rénale ou encore de cystoscopie. Des localisations digestives peuvent nécessiter des endoscopies digestives pour compléter le bilan préopératoire. Plus rarement, des localisations pulmonaires peuvent nécessiter une TDM thoracique ou une IRM pulmonaire, voire une endoscopie bronchique.   Conclusion En cas de suspicion d’endométriose profonde, le bilan préopératoire doit s’astreindre à faire le diagnostic positif de la pathologie tout en appréciant sa sévérité pour déterminer la stratégie thérapeutique avec le meilleur bénéfice/risque pour la patiente. L’interrogatoire, l’examen clinique et l’échographie par voie endovaginale sont les éléments à obtenir en première intention pour le diagnostic préopératoire. Tous les examens complémentaires doivent être réalisés par des opérateurs entraînés au diagnostic d’endométriose. Si une endométriose profonde est suspectée, il ne faut pas hésiter à prescrire une imagerie par résonance magnétique afin de faire le bilan des lésions. Enfin, si une atteinte rectale est suspectée, l’échoendoscopie rectale sera la plus à même d’évaluer l’infiltration rectale et sa profondeur, guidant le chirurgien dans la planification de son intervention. Cyrille Huchon remercie le CNGOF pour son soutien.

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