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Infertilité

Publié le 20 aoû 2012Lecture 7 min

Insuffisance ovarienne : quelle prise en charge proposer ?

F. LEPERLIER, T. FREOUR, P. BARRERE - Service de médecine et biologie de la reproduction, CHU Nantes
Il faut garder à l’esprit que l’évaluation de la réserve ovarienne est réalisée au sein du bilan du couple et qu’un bilan mécanique féminin ainsi qu’une étude du sperme doivent être réalisés concomitamment. Si l’insuffisance ovarienne est retrouvée comme seul facteur d’infécondité du couple, il s’agit alors probablement d’une infécondité précédemment dite « inexpliquée », dans laquelle les altérations quantitatives et qualitatives des ovocytes jouent un rôle prépondérant.
S’il existe un autre facteur d’infertilité associé, comme une infertilité tubaire ou une indication spermatique d’ICSI, nous pensons qu’au moins une tentative de stimulation doit être réalisée chez ces patientes, sauf peutêtre dans les cas extrêmes, quand le taux de FSH est > 15 UI/l notamment. Le cas est plus problématique quand l’IOP est la seule cause retrouvée d’hypofertilité dans le couple : faut-il prendre en charge le couple en AMP ou non et quelle est la technique d’AMP la plus efficiente le cas échéant ? Chez ces patientes, plus encore que chez d’autres, le rappel des mesures hygiénodiététiques, à type d’arrêt du tabac et de normalisation pondérale si nécessaire, sont indispensables, puisque leur application va permettre d’optimiser au maximum une situation ovarienne peu favorable au départ. Les couples doivent également être tenus au courant du fait que des chances de grossesse spontanées existent, et qu’elles sont de l’ordre de 3 à 10 % selon les études. Peu de séries randomisées existent dans la littérature comparant l’efficacité d’une prise en charge en AMP par rapport à une abstention thérapeutique et comparant entre elles les différentes approches médicalisées, notamment stimulation sans IIU versus avec IIU et IIU versus FIV. IIU ou FIV • Une prise en charge en IIU avec stimulation de l’ovulation a été envisagée en cas d’échec de stimulation pour FIV chez les patientes jeunes ou d’emblée, chez des patientes plus âgées, pour lesquelles il existe une impossibilité de prise en charge en FIV. Certaines équipes réalisent dans ce cas, préalablement, un prétraitement par estrogènes débuté à la fin de la phase lutéale du cycle précédant pour limiter l’avance de maturation folliculaire du cycle stimulé, puis utilisent des doses assez élevées de gonadotrophines pour permettre un recrutement bi- ou trifolliculaire et ainsi, potentiellement augmenter les chances de grossesse. Ce protocole n’a fait l’objet d’aucune validation scientifique et ne doit probablement pas être proposé sur un trop grand nombre de cycles pour ne pas retarder la mise en oeuvre des techniques alternatives qui offrent de bien meilleures chances de grossesse. • La prise en charge en FIV dans un contexte d’insuffisance ovarienne isolée n’a pas fait la preuve de son efficacité dans la littérature, comparativement à une prise en charge en IIU ou à une exposition spontanée à la grossesse, mais il existe, là aussi et de façon encore plus marquée, un facteur « âge de la femme » qui est déterminant et qui doit probablement nous pousser à tenter la réalisation d’une FIV chez les femmes les plus jeunes, alors qu’un essai de FIV pourrait avoir un rôle plus « palliatif » et d’aide au deuil de la procréation intraconjugale chez les patientes plus âgées.   Quels protocoles ? Plusieurs protocoles de stimulation ont été étudiés dans ce contexte d’IOP sans qu’aucun n’ait montré une efficacité supérieure en termes de taux de grossesse : ainsi, l’utilisation d’un protocole agoniste court n’est pas plus efficace qu’un protocole agoniste long (1), l’utilisation d’un protocole antagoniste n’est pas plus efficace qu’un protocole agoniste long (2) ni qu’un protocole agoniste court (3). Des auteurs ont également prôné la réalisation, chez ces patientes, de FIV en cycles naturel, technique moins coûteuse et moins invasive, mais qui n’a pas fait la preuve de son efficacité (4). L’utilisation de gonadotrophines recombinantes n’est pas plus efficace chez les mauvaises répondeuses que celle de gonadotrophines urinaires (5). Il a également été proposé chez ces patientes obtenant le plus souvent un faible nombre d’ovocytes, la réalisation d’une ICSI systématique pour optimiser les chances de fécondation, mais là encore, la littérature n’apporte aucune preuve de la supériorité de cette prise en charge (6). Une étude italienne a proposé, au cours d’une étude randomisée sur 281 patientes en IOP, la réalisation d’un transfert précoce à J2 au lieu de J3 de ces embryons jugés « fragiles » et a montré une augmentation des taux de grossesse clinique par ovocyte recueilli et par embryon transféré dans le groupe ayant bénéficié d’un transfert à J2 alors que les taux d’implantation étaient équivalents dans les deux groupes (7). Ces résultats méritent d’être confirmés par d’autres études. Le dogme consistant à penser que des doses plus élevées de gonadotrophines sont nécessaires à la stimulation des patientes en IOP doit être revisité puisqu’une augmentation des doses ne permet en aucun cas d’augmenter l’effectif de la cohorte folliculaire disponible pour le recrutement. Des études ont même mis en évidence une augmentation des taux de grossesse en utilisant des doses moindres de gonadotrophines(8), peut-être en étant moins délétère sur la qualité ovocytaire.   Des traitements adjuvants ? De nombreux traitements adjuvants à la stimulation ont été proposés pour tenter d’améliorer les taux de grossesse, sans preuve scientifique de leur efficacité pour la plupart (9, 10) : – le citrate de clomiphène, qui en augmentant la sécrétion des gonadotrophines endogènes aurait pu améliorer la réponse à la stimulation (11) ; – le GhRH (Growth hormone Releasing Hormone), qui augmente la stéroïdogenèse et la production d’AMP cyclique locale (12) ; – la L-arginine, modulateur intraet intercellulaire de la physiologie ovarienne (13) ; – la testostérone transdermique qui aurait pu augmenter le nombre de petits follicules antraux et/ou augmenter leur sensibilité à la FSH (14) ; – le létrozole, inhibiteur sélectif de l’aromatase, qui diminue la production d’estrogène et ainsi le feed back négatif sur les gonadotrophines endogènes (15). Des études ont, de plus, émis un doute sur les effets secondaires potentiellement néfaste de cette dernière molécule sur la grossesse (16). • La GH potentialise les effets des gonadotrophines sur les cellules de la granulosa (17) et plusieurs études ont montré un effet bénéfique de cette molécule en termes de taux de naissances d’enfants vivants quand elle était coadministrée durant la stimulation (3, 18).Les auteurs des métaanalyses jugent cependant le nombre de patientes incluses trop faible pour conclure formellement à cette efficacité. • La SDHEA, débutée quelques mois avant la stimulation, permet, selon certains auteurs, d’améliorer la réponse ovarienne à la stimulation, de diminuer les annulations de cycle, d’améliorer la qualité embryonnaire et d’augmenter les taux de grossesses cliniques par embryon transféré (19). Le mécanisme évoqué par Gleicher est celui d’une diminution du taux d’aneuploïdie ovocytaire(20). Cet auteur décrit également des taux d’avortement spontanés précoces diminués sous SDHEA. Au-delà de ces résultats plus ou moins concluants, il faut savoir accompagner psychologiquement les couples et les patientes dans l’acceptation difficile du diagnostic d’insuffisance ovarienne et dans le deuil de la procréation intraconjugale pour pouvoir les amener, si nécessaire, et plus ou moins rapidement, selon l’âge de la femme, la profondeur de l’altération de la réserve ovarienne et la durée d’exposition à la grossesse, vers les solutions alternatives efficaces que sont le don d’ovocyte, le don d’embryon ou l’adoption. Nous rappellerons, enfin, qu’en dehors d’un désir de grossesse, l’IOP et l’hypoestrogénie qui lui est associée, augmentent de façon importante les risques ostéoporotiques et cardiovasculaires des patientes et qu’un traitement hormonal substitutif doit leur être proposé probablement jusqu’à l’âge théorique de la ménopause (21).

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