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Colposcopie

Publié le 03 juil 2012Lecture 7 min

Interpréter la colposcopie avec le test HPV

M.-D. BENMOURA, Marseille

Le test HPV est actuellement utilisé de façon très diverse et très loin de sa seule indication reconnue en France, à savoir, en complément d’un frottis de classe ASC-US (classe indéterminée nécessitant de façon compréhensible une précision de diagnostic). Cette seule indication reconnue est beaucoup trop restrictive, mais les indications actuelles sont souvent fantaisistes. Nous passerons donc en revue les différents cas où le test HPV peut rendre un réel service.

Illustration/figure 1. : Frottis ASC-H avec colposcopie « non satisfaisante » par ligne de jonction non vue.   Rappel des définitions Le test HPV recherche la présence d’HPV potentiellement oncogènes ou à haut risque (ou HPV HR) sur le col de l’utérus. La seule technique retenue et validée à l’heure actuelle est l’Hybrid Capture®2 ou HC2®. Ce test n’est recommandé et remboursé en France au prix de 39,69 euros qu’en cas de frottis de classe ASC-US, donc en situation de dépistage du cancer du col. D’une excellente sensibilité (88 à 100 %), le test HPV est malheureusement peu spécifique d’une lésion de haut grade (1). Il n’a par ailleurs de valeur que pour le moment où il a été réalisé, sa positivité pouvant changer relativement vite dans le temps (en l’absence de lésion évidemment). Le génotypage ou typage des papillomavirus correspond à la détermination du ou des types d’HPV présents. La détermination des HPV HR présents est utile en théorie en cas de persistance d’HPV de type 16 ou 18, reconnus comme les plus oncogènes de tous (1). Mais aucun test de génotypage n’est actuellement validé. Quant à la charge virale en HPV, elle ne paraît pas apporter, pour l’instant tout au moins, d’informations utiles.   La colposcopie et ses limites La colposcopie n’est pas, à proprement parler, un examen de « diagnostic ». Cet examen recherche plutôt l’existence d’une anomalie et surtout en établit la cartographie.   Figures 2 et 3. Autre exemple de ligne de jonction non vue : synéchie de l’orifice externe. Ensuite, après évaluation de la gravité, il faut décider de l’indication de biopsie et de la localisation de la ou des biopsies qui vont, elles, avoir un rôle de diagnostic. La colposcopie comporte donc certaines limites, en cas de visibilité ou d’évaluation difficile de la zone de transformation. Le plus souvent, il s’agit de la limite interne (ligne de jonction) ou de la partie interne de la zone de transformation qui reste endocervicale et non visible malgré nos artifices (examen refait après préparation estrogénique ou à une autre période du cycle). Il s’agit donc d’une zone de transformation de type 3 ou ZT3 (2). Assez souvent aussi, il s’agit de l’aspect de cette zone de transformation qui n’est pas assez marqué pour guider notre évaluation. D’une manière générale, la colposcopie est un examen assez sensible mais pas assez spécifique. • Elle comporte une excellente spécificité en cas de : – col normal avec métaplasie parfaitement mature ; – signes de gravité des dysplasies évoquant donc une CIN2 ou 3 (anomalies majeures/ TAG2 a et b) (2-3) ; – cancer exocervical si les signes colposcopiques de cancer sont visibles. Dans ces cas, le test HPV n’apporte rien. • La spécificité devient moyenne dans les cas de : – CIN1/condylomes plans, – métaplasie immature bloquée (ou encore stabilisée) classée par la SFCPCV comme TAG1 (3). Dans ces deux cas, l’examen colposcopique montre parfois une rougeur sans préparation, mais il existe souvent une fine couche de mosaïque visible spontanément. L’acidophilie est absente ou modérée et lente à apparaître. L’aspect après lugol différencie un peu ces deux types de lésions : contours nets avec coloration uniforme jaune et fine pour la métaplasie bloquée, même s’il existe des aspects de mosaïque, et contours nets ou flous avec tous les aspects de colpite qui font évoquer le diagnostic de condylome plan. Dans ces cas, on n’est pas sûr du diagnostic, mais on a le moyen de l’établir. La conduite à tenir sera de biopsier si l’aspect suggère une CIN1, puis de surveiller ou traiter par vaporisation laser selon les recommandations de l’ANAES (4) et le souhait de la patiente.  Figures 4 et 5. Frottis ASCUS après conisation. Zone acidophile et iodo-négative de 6 h à 9 h. Test HPV négatif. La réalisation d’un test HPV ne nous apporte rien, car il est effectivement positif dans la plupart des CIN1 (4). • Enfin, la spécificité de la colposcopie est mauvaise pour les métaplasies immatures (non bloquées), surtout si elles évoquent une dysplasie de haut grade (rougeur sans préparation et acidophilie marquée) et ce, d’autant plus que l’anomalie cytologique est importante. Dans ces cas, le rôle du colposcopiste est de rechercher systématiquement les signes de gravité des dysplasies : épaisseur de la zone acidophile, rougeur qui réapparaît après blanchiment, larges pavés de mosaïque, ponctuations épaisses, association de mosaïques et de ponctuations et zones iodonégatives jaunes et épaisses. En cas de doute, une biopsie est possible et indiquée. • En revanche, la colposcopie n’est pas significative et aucune biopsie n’est possible lorsque la ligne de jonction est endocervicale et non visible ou non accessible à la pince à biopsie : on peut tenter de revoir la patiente à un moment proche de l’ovulation, ou après quelques jours d’estrogènes. Mais cet artifice n’est pas toujours suffisant ou possible (ménopause).   De l’utilité du test HPV Une fois le vagin examiné et aucune lésion n’étant visible sur le vagin, si le frottis est anormal et surtout s’il est de haut grade, le test HPV s’avère très utile et évite une conisation diagnostique s’il est négatif. Figures 6 et 7. Frottis ASC-H. Atrophie avec contre-indication aux estrogènes. Test HPV négatif. Rappelons que, dans ce cas, il n’est ni recommandé, ni remboursé, mais son coût est bien moins élevé que celui d’une conisation inutile ! D’après la revue de la littérature effectuée par l’ANAES (4), le frottis ASC-H et le frottis de haut grade ne correspondent à une dysplasie de haut grade que dans 40 % et 75 % des cas respectivement. Donc, ne tenir compte que du frottis ASC-H ou de haut grade en cas de ligne de jonction non vue entraînerait une conisation inutile dans un cas sur deux. Il est conseillé, dans ces cas de discordance cyto-colposcopique, surtout si elle se répète, de faire les frottis ultérieurs après une préparation estrogénique d’une dizaine de jours. L’évaluation colposcopique est aussi très gênée après conisation en raison des séquelles de l’intervention : acidophilie et zone iodo-négative signant parfois une récidive. La réalisation de biopsies est en général possible, mais elle est à mettre en balance avec un test HPV qui, négatif, est rassurant. S’il est positif, il doit nous faire poursuivre la surveillance par colposcopie (et biopsies si nécessaire)… et il nous aide à faire prendre conscience de leur tabagisme aux patientes fumeuses. D’autres situations, particulières et assez rares, peuvent se produire et nécessiter un test HPV. • En cas de ménopause, il arrive fréquemment d’avoir un frottis de classe ASC-H ou de haut grade.Or, les patientes de cet âge ont parfois aussi une muqueuse atrophique gênant l’évaluation et une contre-indication relative aux estrogènes (en raison d’un cancer du sein ou d’un antécédent d’accident thromboembolique). Un test HPV positif dans ce cas autorise la pratique d’une conisation « diagnostique ». • Et enfin, mais plus rarement, il nous arrive de recevoir une patiente sous anticoagulants (contre-indication au moins relative à une biopsie immédiate). Lorsqu’il y a nécessité de biopsier, on peut prévoir, bien sûr, une consultation en vue d’un changement de traitement puis une colposcopie de contrôle, mais il est plus simple de réserver ce procédé aux seuls cas où le test HPV est positif. C’est dans ces situations très précises que le test HPV peut nous aider, en nous rassurant dans les cas où il est négatif et en nous aidant à trouver la meilleure solution dans les autres cas (surveillance adaptée et parfois conisation si nécessaire).   EN PRATIQUE Dans certains cas, après avoir utilisé les différents examens recommandés et remboursés, nous manquons de précision diagnostique : anomalie cytologique avec colposcopie normale ou au contraire non satisfaisante, en raison d’une ligne de jonction invisible ou d’une atrophie avec contre-indication aux estrogènes. Dans ces cas, il serait contraire aux données actuelles de la science de se priver des services d’un test, non remboursé certes dans ces cas, mais peu onéreux. Il n’est pas question de multiplier sans raison cet examen, mais bien au contraire de l’utiliser sciemment quand les autres examens sont limités, ce qui nécessite de bien connaître ces indications. Le test HPV peut aussi rendre service dans quelques situations cliniques rares mais embarrassantes : – cytologie anormale avec colposcopie normale et satisfaisante ; – colposcopie non satisfaisante par ligne de jonction endocervicale non vue ou par atrophie avec contre-indication aux estrogènes ; – colposcopie manquant de spécificité après conisation ; – biopsie immédiate impossible en cas d’anticoagulants.

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