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Infertilité

Publié le 04 oct 2016Lecture 7 min

Place de la cœlioscopie dans le bilan d’infertilité

M. CARBONNEL, Hôpital Foch, Suresnes

La cœlioscopie reste à ce jour le gold standard des examens diagnostiques dans les anomalies anatomiques pelviennes associées à l’infertilité. Souvent négligé au profit d’un passage rapide en fécondation in vitro, sa place dans la stratégie diagnostique et thérapeutique doit être clairement définie afin d’adapter la prise en charge du couple infertile et de potentialiser ses chances de grossesses naturelles et par assistance médicale à la procréation. Un tiers des infertilités sont dues à des anomalies anatomiques pelviennes. Dans les années 1990, la cœlioscopie était réalisée dans 90 % des bilans d’infertilité.

Un tiers des infertilités sont dues à des anomalies anatomiques pelviennes. Dans les années 1990, la cœlioscopie était réalisée dans 90 % des bilans d’infertilité. Actuellement, elle est plus controversée pour différentes raisons : – elle présente des risques opératoires et anesthésiques (morbidité de 0,6/1 000 dont 0,2/1 000 risque de plaie vasculaire et 0,4/1 000 plaie viscérale) ; – il existe d’autres tests diagnostiques moins invasifs ; – surtout, le rapport coût/bons résultats de la FIV incite actuellement plus souvent à ne pas réaliser de cœlioscopie en l’absence de point d’appel dans le bilan d’infertilité. La cœlioscopie comporte néanmoins des avantages, dont la possibilité thérapeutique concomitante, et elle reste à ce jour le meilleur examen diagnostique des anomalies anatomiques pelviennes.   Évaluation tubaire     Pertinence des tests diagnostiques non invasifs   L’interrogatoire Certains éléments de l’interrogatoire sont évocateurs d’une pathologie tubaire : les antécédents d’appendicite compliquée exposent à un risque relatif (RR) x 7, ceux de chirurgie pelvienne à un RR de 3,6 et ceux de maladie inflammatoire pelvienne à un RR de 3. Une symptomatologie évocatrice d’endométriose expose à un RR de 5,9.   La sérologie Chlamydia La valeur diagnostique de la séropositivité de la sérologie Chlamydia est comparable à l’hystérosalpingographie (HSG). Si sa sensibilité est médiocre (68 %), sa spécificité est correcte (82 %) pour le dépistage des pathologies tubaires. Ainsi, une sérologie positive doit faire suspecter une anomalie tubaire. La rentabilité d’un dépistage de masse dépend de la prévalence de l’infection à Chlamydia dans la population étudiée. Les techniques de dosages et les seuils de positivité des anticorps sont également des freins à son interprétation.   L’hystérosalpingographie Bien que réalisée de manière systématique dans le bilan d’infertilité, l’HSG est un mauvais examen de dépistage. Sa sensibilité est de 83 %, mais sa spécificité est de 65 % seulement. Sa normalité n’élimine donc pas une anomalie anatomique tubaire. Elle est néanmoins meilleure que la cœlioscopie pour le diagnostic des pathologies tubaires proximales à condition qu’elle soit associée à une salpingographie sélective afin de différencier les pathologies fonctionnelles qui peuvent être corrigées par un cathétérisme sélectif, des pathologies organiques définitives. Elle est comparable à la cœlioscopie pour le diagnostic des pathologies tubaires distales. Elle est nettement inférieure à la cœlioscopie pour le diagnostic des pathologies péritubaires (adhérences). Elle comporte également des biais d’interprétation qui expliquent une variabilité interobservateur de 20 %. En contrepartie, sa morbidité est faible. Le risque infectieux initialement évalué entre 1 et 3 % est largement diminué par l’utilisation de cyclines en prophylaxie systématique. Par ailleurs, la réalisation d’une HSG avec produits de contrastes liposolubles augmente par 3 les chances de grossesse spontanée par effet « flushing ». Ainsi, malgré sa faible valeur prédictive négative en termes de dépistage, elle est toujours recommandée en première intention.   L’échographie et l’hystéro-sonosalpingographie La mise en évidence de critères échographiques d’hydrosalpinx (masse allongée avec septa incomplets) a une excellente valeur diagnostique : la sensibilité est de 84 % et la spécificité de 97 %. L’hystéro-sonosalpingographie avec utilisation du Doppler permet d’évaluer les trompes. Elles montre des résultats encourageants et pourrait représenter une alternative séduisante à l’HSG dans le futur. Elle est actuellement en cours d’évaluation et n’est pas recommandée en pratique courante.   Pertinence de la cœlioscopie   C’est l’examen de référence pour l’exploration de la perméabilité tubaire. Sa valeur pronostique est bien supérieure à celle de l’HSG. En effet, le taux de fertilité spontanée est de 0,15 en cas de 2 trompes occluses et 0,51 en cas d’une trompe occluse en cœlioscopie, alors qu’il est de 0,49 en cas de 2 trompes occluses et 0,8 en cas d’1 trompe occluse en HSG. Elle permet également d’explorer complètement la cavité abdomino-pelvienne et notamment de mettre en évidence un syndrome de Fitz-Hugh-Curtis, des adhérences pelviennes et des lésions d’endométriose associées. Elle doit être systématiquement réalisée en cas d’anomalies objectivées sur les examens non invasifs de dépistage, car elle a également un rôle thérapeutique. Elle doit être précise et exhaustive dans la description des lésions tubaires et des adhérences car, en fonction de leur localisation et de leur étendue, ces lésions modifient l’attitude thérapeutique. Des annexes normales sont des trompes fines, sinueuses, libres dans leurs fossettes, avec un pavillon épanoui et un passage de bleu de méthylène positif sous faible pression, associé à un ovaire libre dans sa fossette (figure 1). La cœlioscopie doit donc remplir un cahier des charges.   Figure 1. Pavillon tubaire avec muqueuse normale.   Cahier des charges de la cœlioscopie : les scores tubaires L’utilisation de scores tubaires avec évaluation de la muqueuse est recommandée afin de définir la stratégie thérapeutique. Le score de Mage et le score muqueux de Brossens sont classiquement utilisés (tableaux 1 et 2).   Lors d’une plastie tubaire en cas de trompes perméables et de score muqueux de Mage I ou II, on note 64 % de grossesses spontanées, 36 % pour les scores III et IV, 0 % pour le score V. En cas d’hydrosalpinx et de score I ou II, on note 79 % de grossesses spontanées, 24 % pour les scores III et IV et 0 % pour les stades V. De même pour le stade de Mage après salpingostomie, il n’y a pas de grossesse spontanée dans les stades IV, 12 % dans les stades III, contre 50 et 60 % dans les stades II et I. Il ne convient donc de réaliser des plasties qu’en cas de muqueuse tubaire de bonne qualité, et des salpingectomies qu’en cas de muqueuses altérées. D’autres éléments doivent également entrer en ligne de compte dans le choix thérapeutique. En effet, si le couple doit bénéficier d’une FIV, la salpingectomie doit être réalisée en cas d’hydrosalpinx. A contrario, un couple ne pouvant bénéficier de FIV sera orienté vers une plastie tubaire.   Cahier des charges de la cœlioscopie : les scores adhérentiels   Les adhérences pelviennes doivent être bien décrites concernant leur localisation et leur caractère, denses ou fines (figure 2). Les scores AFS ou OLSG peuvent être utilisés pour faciliter la description. Il existe un impact du type et de l’étendue des adhérences sur la fertilité spontanée et sa restauration. Il existe un bénéfice démontré pour la fertilité spontanée de l’adhésiolyse. Mais les adhérences denses sont associées à de mauvais résultats. Après adhésiolyse, la conception est de 57 % pour des adhérences fines, 35 %pour des adhérences moyennes, et 0 % pour des adhérences denses.   Figure 2. Adhérences denses de l’ovaire dans la fossette ovarienne.   Ainsi, un pelvis « gelé » par des adhérences denses doit faire renoncer à une adhésiolyse en raison de son inefficacité et de sa morbidité (plaies digestives).   Cœlioscopie diagnostique dans l’endométriose   La prévalence de l’endométriose dans une population de patientes infertiles (20 à 68 %) est plus élevée que dans la population générale (2,5 à 3,3 %). Si des signes cliniques sont évocateurs à l’interrogatoire, comme la dyspareunie ou les dysménorrhées, aucun n’est pathognomonique et des patientes asymptomatiques peuvent également souffrir d’endométriose. Si l’on associe examen clinique, échographie et IRM, la sensibilité et la spécificité en termes de diagnostic sont inférieures à 85 %. Si l’IRM est un excellent examen de dépistage pour les lésions d’endométriose profonde, elle peut méconnaître des lésions d’endométriose superficielle et des adhérences. La cœlioscopie associée à l’examen clinique sous anesthésie générale reste l’examen de référence dans le diagnostic de l’endométriose. Elle doit remplir un cahier des charges et décrire l’ensemble des lésions de manière exhaustive à l’aide du score AFSR. Ce score a un rôle pronostique. Les stades AFSR III et IV sont associés à des taux de fertilité spontanée très bas. La cœlioscopie a également un rôle thérapeutique en termes de fertilité spontanée. Si son bénéfice est démontré pour les stades 3 et 4 des scores AFSR avec 40 à 50 % de fertilité spontanée après chirurgie, versus3 % sans chirurgie, il est plus controversé dans les stades précoces. Il semble néanmoins que le traitement chirurgical des stades 1 et 2 permette d’obtenir des taux de grossesses spontanées de 30 % à 1 an versus 17 % sans chirurgie. La cœlioscopie a, dans l’endométriose, à la fois un intérêt diagnostique, pronostique et thérapeutique. Elle est donc indispensable dans le bilan d’endométriose.   Place de la cœlioscopie dans l’infertilité inexpliquée   La prévalence de l’infertilité inexpliquée est de 10 à 15 %. Si une cœlioscopie est réalisée après 4 cycles de citrate de clomiphène, il est mis en évidence 50 % d’endométriose et 33 % d’adhérences pelviennes. En cas d’infertilité secondaire, un plus grand nombre d’anomalies est retrouvé. Cependant, il n’y a pas plus de taux de grossesses si la cœlioscopie est réalisée avant ou après plusieurs inséminations intra-utérines (IIU). La cœlioscopie semble donc avoir une place dans l’exploration de l’infertilité inexpliquée après les IIU avant le passage en fécondation in vitro. Sa place est à pondérer avec l’âge de la patiente et sa réserve ovarienne.

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