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Infertilité

Publié le 26 oct 2014Lecture 9 min

Indications des cœlioscopies de second look

A. VOULGAROPOULOS, C. YAZBECK, M. KOSKAS, Hôpital Bichat, Paris
L’effet délétère des adhérences sur la fertilité des patientes est connu, et si la chirurgie de l’infertilité peut en être pourvoyeuse, le bénéfice d’une chirurgie de « second look » systématique n’est pas démontré. En revanche, le développement de barrières anti-adhérentielles efficaces constitue certainement un enjeu de premier plan dans la prise en charge chirurgicale des patientes infertiles pour prévenir l’apparition et/ou la récidive de ces dernières.
Nous avons évalué la place de la chirurgie de second look cœlioscopique dans la prise en charge des patientes infertiles par le biais d’une revue de la littérature en fonction de l’indication de la première chirurgie (second look après myomectomie, après chirurgie de l’endométriose et après salpingo-ovariolysis). Dans les cas d’infertilité d’origine annexielle, de la chirurgie des myomes, de l’endométriose, aucun bénéfice sur les taux de grossesse n’a été démontré. C’est la sévérité de l’atteinte adhérentielle initiale qui apparaît être le facteur prédictif prépondérant de récidive des adhérences. Il n’existe à l’heure actuelle aucune donnée justifiant la réalisation systématique d’une chirurgie de second look dans l’infertilité, quelles que soient l’indication et la sévérité de l’atteinte initiale. Les principales causes d’infertilité chez la femme sont les troubles de l’ovulation (32 %) et les pathologies tubaires (26 %)(1). Depuis plusieurs années, les indications de la chirurgie de « premier look» de l’infertilité tubaire tendent à diminuer au profit de l’assistance médicale à la procréation (AMP). En 2008, Feinderg et coll. publiaient un article dans Fertility and Sterilitysous le titre : “Infertility surgery is dead : only the obituary remains”(1). Par ce titre volontairement polémique, les auteurs défendaient la supériorité de l’AMP et ne reconnaissaient plus que de rares indications à la chirurgie dans la prise en charge des patientes infertiles : certaines occlusions tubaires distales, la reperméabilisation tubaire après stérilisation volontaire et certaines endométrioses peu invasives. Il importait de rétablir un état des lieux plus nuancé concernant la place actuelle de la chirurgie dans le traitement des principales causes affirmées ou supposées d’infertilité(2). Dans la prise en charge des patientes infertiles, les indications de chirurgie tendent à diminuer, mais le bénéfice de certaines indications reste indiscutable (myomectomie, plasties tubaires, salpingo-ovariolysis, endométriose). La chirurgie de « second look » a pour principal objectif d’effectuer une adhésiolyse complète des adhérences secondaires ou persistantes après la première chirurgie. Le type de chirurgie première ainsi que le délai écoulé entre les deux procédures ont certainement un impact sur l’étendue et la sévérité des adhérences retrouvées. Pour cette raison, nous avons distingué les diverses indications de chirurgie de « second look » en fonction de la première.   Revue de la littérature Nous avons conduit une revue systématique de la littérature sur les bases de données Cochrane et Medline jusqu’en 2012 en utilisant les termes suivants : « second look laparoscopy », « infertility », « polycystic ovary syndrome », « tubal plasty », « endometriosis », « myoma ». La sélection des études retenues a privilégié les méta-analyses et les essais randomisés contrôlés. En l’absence de telles études, ce sont les études rétrospectives qui ont été analysées.   Second look après chirurgie tubaire et ovarienne Les bons résultats du salpingo-ovariolysis justifient d’en conserver l’indication en cas d’infertilité puisqu’il est suivi de grossesses dans la moitié des cas pour des indications raisonnables. L’échec de plastie tubaire ou de salpingo-ovariolysis constitue une cause relativement fréquente d’infertilité prolongée. Malgré l’utilisation de la voie cœlioscopique, moins pourvoyeuse d’adhérence, le risque adhésiogène n’est pas supprimé. La méta-analyse de la Cochrane datant de 2009 regroupe 2 études randomisées(3,4) étudiant l’impact d’une chirurgie de « second look » sur le taux de grossesses, de naissances vivantes, de grossesses ectopiques et de complications opératoires. Ces deux études totalisaient 114 patientes mais, en raison des différences de nature des chirurgies de première intention entre les deux études (plastie tubaire et drilling ovarien dans le cadre de syndrome des ovaires polykystiques), des différences de délai entre les chirurgies de premier et « second look », il nous semble légitime de les dissocier. Les résultats n’indiquent pas de bénéfice en termes de fertilité, ni de réduction du risque de grossesse extrautérine. En 2003, une étude randomisée totalisant 90 patientes réparties en 2 groupes (groupe 1 : chirurgie de second look, groupe 2 : groupe contrôle) a comparé le pronostic de fertilité de patientes infertiles à bilan hormonal normal(5). Lors de la chirurgie de second look, la reformation des adhérences modérées à sévères était observée dans 40 % des cas à J8-28. Surtout, la sévérité et la fréquence des adhérences à la fin de la deuxième intervention étaient identiques à celles de la fin de la première. Il n’existait pas de différence significative pour le taux de grossesses spontanées entre les deux groupes. Cette étude n’a pas été retenue dans la méta-analyse évaluant le bénéfice d’une cœlioscopie de « second look » en raison du mode de randomisation mais ne plaide pas non plus pour un « second look » précoce après adhésiolyse.   Second look après myomectomie Les myomes utérins sont présents chez 25 à 30 % des femmes en âge de procréer. Rares sont les études ayant comparé les taux de grossesses avec et sans myomes utérins, après exclusion des autres facteurs d’infertilité. Une seule a comparé les incidences de grossesse spontanée chez des femmes infertiles porteuses ou non de myome intra-utérin(6). Elle retrouvait un taux de grossesses supérieur chez les patientes sans myome (25 % vs 11 %). D’autres études, rétrospectives ou cas-témoins, ont démontré le rôle délétère sur la fertilité des fibromes sous-muqueux ou interstitiels déformant la cavité. Le traitement des autres variétés de myomes (interstitiels ne déformant pas la cavité ou sous-séreux) en cas d’infertilité dépend du contexte, en particulier de l’âge, de la durée et de l’existence d’une autre cause d’infertilité. Toutefois, chez une patiente jeune dont le bilan étiologique ne retrouve aucune autre anomalie qu’un myome, son exérèse peut apparaître licite. Dans la mesure où aucune voie d’abord pour la résection de ces myomes n’a fait la preuve de sa supériorité en termes de fertilité, il semble logique de privilégier la cœlioscopie autant que possible. La chirurgie des myomes est une intervention adhésiogène et la question de la légitimité d’une cœlioscopie de « second look » méritait d’être posée. En 2012, Kubinova et coll. ont montré que le taux de grossesses chez 170 patientes ayant bénéficié d’une myomectomie (par laparotomie ou par cœlioscopie) n’était pas différent significativement, que celles-ci aient bénéficié ou non d’une chirurgie de « second look »(7). Les taux de grossesses dans les deux groupes (à 2 ans) étaient de 61 % dans le groupe A (second look) et 67 % dans le groupe B (p = 0,535). L’étude de Takeuchi et coll. qui incluait 372 patientes infertiles ayant bénéficié d’une myomectomie cœlioscopique suivie d’une cœlioscopie de « second look » suggère que la formation d’adhérence est corrélée à la taille et au nombre de myome retirés. Toutefois, le pronostic de fertilité n’était pas précisé dans cette étude. L’étude d’Ugur et coll. suggère qu’une cœlioscopie d’adhésiolyse post-myomectomie par laparotomie permet de réduire les adhérences formées (constatées lors d’un « troisième look ») (p < 0,001). Mais sa méthodologie est discutable et l’effectif faible.   Second look après endométriose S’il est communément admis que l’endométriose est associée à une diminution de la fertilité, son réel impact sur la fécondité et les mécanismes sous-jacents ne sont pas toujours bien cernés. La fécondité, définie par la probabilité pour une femme de mener une grossesse à terme au cours d’un cycle, se trouve diminuée en cas d’endométriose(8). L’impact d’une endométriose modérée sur l’infertilité, en l’absence d’atteinte tubaire, est mal établi, mais l’intérêt de la cœliochirurgie dans ce contexte est reconnu. Bien que peu d’essais randomisés aient évalué l’efficacité du traitement chirurgical de l’endométriose profonde dans la prise en charge des patientes infertiles, il existe quelques raisons de penser qu’elle peut être justifiée dans cette indication. Elle est en tout cas peu discutable en cas de symptomatologie invalidante associée(9). En 2001, Chapron et coll. ont étudié le bénéfice d’une chirurgie de « second look » après résection des ligaments utérosacrés pour endométriose dans un délai de 3 à 6 mois(10) ; 85 % avaient peu ou pas d’adhérences et les deux facteurs associés à l’existence d’adhérences au « second look », étaient un score initial AFS III/IV ainsi que l’atteinte latéralisée à gauche par rapport au côté droit. En 2008, Luciano et coll. ont également étudié l’impact de la sévérité et l’extension initiale des adhérences dans le cadre de l’endométriose, et montré un impact sur la formation de nouvelles adhérences chez 38 patientes(11). La localisation et l’extension initiale des adhérences sont un facteur prédictif de l’apparition d’adhérence de novo. Dans cette étude, la fertilité des patientes opérées n’a pas été détaillée non plus. Gurgan et coll. avaient étudié la formation d’adhérences de novo après le traitement d’endométriome chez 19 patientes infertiles et après 3 mois de traitement par analogue de la GnRH(12). Aucune adhérence de novo n’a été observée et 9 patientes ont obtenu une grossesse. Aucune donnée dans la littérature ne plaide pour la réalisation systématique d’une cœlioscopie de « second look » dans l’objectif d’une amélioration de la fertilité.

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