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Infertilité

Publié le 15 juin 2014Lecture 5 min

Pertubateurs endocriniens et fertilité féminine

C. COTINOT UMR 1198, Biologie du développement et reproduction, INRA, Jouy-en-Josas

Les perturbateurs endocriniens sont des substances chimiques exogènes présentes dans notre environnement, capables d’altérer le foncionnement de muliples organes, entraînant ainsi des effets nocifs à long terme sur la santé et la reproduction des individus et/ou de leur descendance. La grossesse est une période de vulnérabilité importante, car les processus développementaux sont sensibles à ces molécules chimiques. Des altérations du développement de l’appareil génital, de la glande mammaire, de l’axe hypothalamus-hypophyse-gonade et des gamètes induisant des effets à long terme sur le déclenchement de la puberté, la réserve ovarienne et la ferilité ont été observées dans plusieurs espèces de mammifères. Certaines de ces altérations se transmetent aux générations suivantes.

  Une exposition chronique, multiple et à faible dose Dans notre environnement quotidien, nous sommes exposés à une multitude de molécules chimiques présentes dans l’alimentation (contenu et contenant), l’eau, l’air (intérieur et extérieur) et les produits de consommation courante (cosmétiques, matériel informatique, peintures, vêtements, jouets, etc.). Parmi ces molécules se trouvent les perturbateurs endocriniens qui interfèrent avec l’action des hormones naturelles à de multiples niveaux. Tous les organes des systèmes endocrines sont des cibles potentielles de ces molécules : le cerveau, l’hypothalamus, l’hypophyse, la thyroïde, les surrénales, le tractus génital et les gamètes, le pancréas, le tissu adipeux, la glande mammaire. La fonction de reproduction est une des cibles majeures de ces molécules parmi lesquelles on trouve les phyto-estrogènes (soja), les hormones de synthèse (contraceptifs, THS), des antalgiques légers comme l’aspirine, les anti-inflammatoires ou le paracétamol, et d’autres substances chimiques industrielles : les alkylphénols, les phtalates, les polychlorobiphéniles (PCB), le bisphénol A (BPA), certains pesticides, fongicides et herbicides, ainsi que des molécules entrant dans la fabrication des cosmétiques (parabens, filtres UV) ou encore les hydrocarbones polycycliques aromatiques (PAHs) contenus dans la fumée de cigarette. Chacun d’eux est présent à faibles doses dans l’environnement et est retrouvé dans la plupart des fluides biologiques humains (sérum, liquide folliculaire, sang de cordon ombilical, liquide amniotique). L’exposition humaine est estimée à : BPA = 0,5 à 1 µg/ kg/jour, DEHP = 52 µg/kg/jour et DBP = 5 µg/kg/jour.   La grossesse, une période particulièrement vulnérable   À la suite de nombreuses études effectuées sur des modèles animaux, il a été montré que la période de plus grande vulnérabilité est la grossesse, car les phases précoces du développement sont les périodes critiques de différenciation des organes et les processus biologiques impliqués sont sensibles aux substances hormonalement actives. L’interaction des perturbateurs avec ces processus va avoir des conséquences à long terme sur la reproduction de l’individu adulte et sa descendance en perturbant l’organogenèse des tissus et en induisant des modifications épigénétiques dans les gamètes durant cette période. Dans l’espèce humaine, le tractus génital se différencie à partir de la 5esemaine de gestation et l’ovaire entame sa différenciation à partir de la 8e semaine. Après une phase de prolifération, les ovogonies entrent en prophase de 1 redivision méiotique (méiose I) à la fin du 1er trimestre (12 semaines). Dès le 5e mois, les ovocytes ont achevé la prophase I et sont entourés par une couche unistratifiée des cellules en provenance des cordons sexuels, que l’on appelle « cellules folliculaires » ou « cellules de la granulosa ». Ils forment alors les follicules primordiaux, qui constitueront la réserve ovarienne. Cette réserve, constituée pendant la vie fœtale, sera utilisée jusqu’à la ménopause. Son altération entraînera l’apparition d’insuf­fisance ovarienne précoce. Il est à noter que la formation des follicules primordiaux a lieu après la naissance chez les rongeurs. Les périodes de vulnérabilité seront donc différentes entre espèces de mammifères.   Mécanismes susceptibles d’être perturbés au cours du développement femelle Les modèles animaux ont montré que des expositions in utero entraînent des modifications de la cyclicité et des précocités sexuelles en agissant sur l’axe neuro­-endocrine­-gonade (altérations au cours du développement de l’hypothalamus et de l’hypophyse (système KiSS­1/GPR54, récep­teurs GnRH et galanine). Au niveau ovarien, l’impact négatif des perturbateurs endocriniens a été décrit sur la méiose des ovocytes, la formation des follicules, leur activation, le contrôle de la réserve ovarienne et la programmation épigénétique des ovocytes. Toutes ces altérations ont pour effet de modifier le nombre et la qualité des follicules et d’entraîner des baisses de fertilité des individus femelles (apparition d’ovaires polykystiques, dimi­nution de la réserve ovarienne aboutissant à des insuffisances ovariennes prématurées). Enfin, au niveau de l’organoge­nèse des organes génitaux internes (utérus : endométriose, polypes), externes (distance anogénitale) et de la glande mammaire, ayant des effets à long terme sur l’apparition des malformations ou sur l’inci­dence de cancers hormono­-dépendants.   En conclusion   • Les effets des perturbateurs endocriniens sont espèce­, âge­, sexe­ et tissu­ spécifiques. • La période de développement des organes et de la mise en place des marques épigénétiques dans les gamètes est une période de grande vulnérabilité. • Limiter au maximum l’exposition aux perturbateurs endocriniens dès la période péri-conceptionnelle, pendant toute la gestation et au cours de l’allaitement. • Les expositions in utero peuvent avoir des effets à long terme, non seulement au cours de la vie de l’individu, mais sur sa descendance, démonstration en a été faite jusqu’à la 3e géné­ration pour un mélange de plas­tifiants chez les rongeurs et pour le diéthylstilbestrol (DES) dans l’espèce humaine.   Conseils pour limiter l’exposition aux perturbateurs endocriniens – Éviter tout contact direct de la nourriture avec du plas­tique (sac plastique, film étirable, barquette) et surtout ne pas cuire ou chauffer de la nourriture dans du plastique, utiliser des récipients en céramique ou en verre. – Éviter d’utiliser des bouteilles, des gobelets et couverts en plastique. Dans tous les cas, ne jamais les chauffer. – Éviter les aliments en conserve métallique dont l’intérieur est enduit de BPA (légumes, poissons, fruits au sirop, canettes de soda, etc.). Préférer les conserves et les boissons en bocaux de verre. – Consommer avec modéra­tion : la pâte à tartiner à la noisette industrielle souvent très chargée en phtalates, les produits contenant du soja. – Toujours laver et/ou éplu­cher les fruits et légumes pour éliminer les résidus de pesticides, fongicides, herbi­cides. – Regarder attentivement la composition des cosmé­tiques, dentifrices, déodo­rants, mousses à raser, vêtements, jouets, déter­gents.

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